Festival Grockland 2005 Music-hall et Variétés Après Bellelay (BE) en 2003 et La Chaux-de-Fonds l'année passée, c'était au tour de Saignelégier (Jura) de rendre hommage au clown Grock, mais aussi de regarder vers l'avenir avec la finale du Grock d'or, récompensant des jeunes artistes des écoles de cirque. Le 3ème Festival Grockland, organisé par Laurent Diercksen et l'Association Grockland, a eu lieu du jeudi 1 er au dimanche 4 septembre 2005. Si le spectacle de gala est le point fort de ce festival, il ne faut pas oublier les autres rendez-vous. Ainsi, le festival a été ouvert le jeudi soir par le spectacle des clowns Calvero (clown-poète) et d'Alciati (auguste). Le vendredi, c'est une dimension moins connue de Grock qui a été proposée à la re-découverte du public, celle de compositeur. Des formations aussi diverses qu'un jazz-band, un sextet, un duo de guitares, deux accordéonistes et un orgue de barbarie pour interpréter les mélodies de Grock: c'est ce que proposait le concert "Grock-Notes". Durant ce festival, il était aussi possible d'assister à la conférence de Laurent Diercksen sur la vie de Grock (qui aurait cette année 125 ans) et de visiter l'exposition avec photos, lettres et objets (accordéon, clarinette) du célèbre clown. Spectacle "Gala du Grock d'or" Cette année, le spectacle a marqué une forte évolution vers le music-hall. Cela correspond à l'environnement dans lequel Grock se produisait et permet au festival de se démarquer d'autres spectacles. La représentation a eu lieu dans la Halle-Cantine de Saignelégier, tout en bois, avec poutres apparentes. Ce bâtiment accueille chaque année une partie des fêtes du célèbre "Marché-concours de chevaux". La salle avait un air de Moulin Rouge avec des tentures rouges et des tables avec bougies. Cette ambiance de music-hall est confirmée dès l'ouverture du spectacle par un french cancan présenté dans les règles de l'art, avec costumes et cris, par une dizaine de danseuses de l'Ecole du cirque de Lausanne! Le fil rouge de la soirée est assuré par le clown excentrique Housch Ma Housch, lauréat du Grock d'or international décerné à Paris lors du Festival mondial du cirque de demain en février 2005. Cet Ukrainien, actuellement l'une des stars d'Europa Park, a assurément trouvé son personnage, avec ses couettes (voir photo), sa manière de s'exprimer uniquement par des sons incompréhensibles et ses "wahow" (comme Grock avait son "sans blaaague"). Ses numéros, très visuels, sont difficiles à décrire. On peut mentionner sa parodie du magicien: Housch Ma Housch fait apparaître des lapins, mais en peluche, et en les faisant tomber de son large manteau comme une poule pond un œuf. Ou encore son combat contre du papier adhésif. Personnellement, j'ai trouvé que ses interventions manquaient parfois de finesse. Housch Ma Housch était plus convaincant lorsqu'il a fait participer des gens du public à un numéro de claquettes (ils faisaient l'accompagnement musical). Jeunes artistes prometteurs Les numéros présentés par les finalistes du Grock d'or (c'est la partie "cirque" du spectacle) et la remise des prix sont des moments très attendus du public et des candidats. Ils ont été sélectionnés à Neuchâtel, sous le chapiteau du cirque Starlight, en mai, parmi dix-huit numéros. Pour la première fois, le concours était ouvert aux écoles de cirque de toute la Suisse, mais les trois sélectionnés proviennent tous de Suisse romande. Saphorine Petermann et Fanny Jaussi (16 ans, Ecole-Théâtre Circule, Genève) présentent un numéro aérien mêlant acrobatie sur corde et sur tissus. L'une des jeunes artistes présente des exercices à la corde (blanche), et l'autre aux tissus (rouges). Elles travaillent en alternance mais aussi ensemble. Les deux artistes commencent leur numéro comme si elles étaient des automates, sur une musique de carillon. Ce numéro a reçu le Grock de bronze. Dans une mise en scène et un costume plus classiques, le numéro de contorsion d'Emi Vauthey (Ecole du cirque de Lausanne) a fait une grande impression sur le public, et pas seulement parce qu'il s'agit de la plus jeune lauréate (12 ans). Son élégant numéro de contorsion, dans une lumière bleue, commence au sol, avant de se poursuivre dans un anneau aérien. Emi Vauthey a reçu le Grock d'or. L'année passée, elle avait déjà reçu le premier prix pour un numéro de contorsion avec deux autres artistes. Le numéro qui a obtenu le Grock d'argent nous a plongé dans une ambiance de vacances dans les îles avec musique et chemises hawaïennes. Les matelas sont amenés comme des matelas de plage. Six jeunes hommes (Rémy Fardel, François Lazayre, Sébastien Girard, Jérôme Hugo, Cédric Héritier et Camil
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Amos) de 13 à 17 ans de l'Ecole de cirque Zôfy de Sion nous offrent des sauts à la planche coréenne. Cela ressemble à de la bascule, à la différence que les artistes ne sont pas propulsés loin de celle-ci mais retombent sur la planche pour enchaîner les sauts. C'est un numéro coloré et vif qui a aussi reçu un prix spécial, celui de "Clowns International", une association visant à préserver et développer l'art clownesque. En l'absence de Paul Fratellini et d'Eugène Chaplin (respectivement président et viceprésident du jury), les statuettes à l'effigie de Grock sont remises par le chef des sports du canton du Jura. Leur absence a, à mon avis, fait perdre un peu de solennité à la cérémonie. A noter encore qu'Alfred Reichle faisait partie du jury. La première partie de ce spectacle s'est terminée par la photo de tous les finalistes. Un festival nécessaire Après la pause, un film présente l'Association Grockland, ses activités et ses projets, avant la projection d'un extrait d'un numéro de Grock. Ensuite, Serge Kottelat et Claude Hauser interprètent devant un public sous le charme et silencieux des mélodies de Grock adaptées pour leurs instruments, les guitares jazz. Cela donne une nouvelle dimension aux compositions de Grock. C'est un des moments forts du spectacle, comme l'est le numéro du jeune illusionniste Alexandre Tocqueville (22 ans). Il renouvelle le genre avec une mise en scène originale du monde du rap, avec apparition de cd et d'une bouteille de Coca Cola, qui se transforme ensuite en canette de la même marque! Alexandre Tocqueville, qui passait le week-end suivant à l'Olympia à Paris, change également de vêtements en un éclair. Pour terminer ce gala, Laurent Diercksen a fait appel à deux Biennois, Lukas Weiss et Nico Brina, pour un duo de piano/claquettes à une vitesse endiablée. En effet, Nico Brina est l'un des pianistes les plus rapides au monde (608 touches par minute au Guinness Book 1996). Non seulement Lukas Weiss arrive à le suivre avec ses claquettes, mais il réussit encore à jongler avec trois balles tout en dansant. Ainsi se termine un spectacle varié mais un peu long (3 heures). Comme lors des éditions précédentes, la présentation a été assurée avec classe, finesse et humour par Laurent Diercksen et sa fille Fanny. Leur duo est basé sur le "choc des générations", Fanny confondant Grock et rock! Au-delà de la plaisanterie, cela nous fait prendre conscience que les jeunes ne connaissent plus Grock et donc que des événements comme le Festival Grockland sont nécessaires. A noter encore que pour sa troisième édition, le Festival Grock est devenu le Festival Grockland pour souligner son attachement aux régions de l'enfance du clown et à leur terroir. Ainsi, le public a pu voir dans et autour de la HalleCantine un marché d'artisans et du dressage de chevaux des Franches-Montagnes. Le dimanche, le public a pu se plonger une nouvelle fois dans l'époque de Grock avec un défilé de mode 1850-1950.
Pour tous ceux qui désirent découvrir ou redécouvrir les mélodies de Grock, un cd du concert "Grock Notes" a été enregistré. Ce cd est en vente sur le site www.grockland.ch au prix de 30.François Beuret
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