V i v r e

Connaître & faire valoir ses droits

a v e c

l e

V I H

-

n o u v e l l e

é d i t i o n

d é c e m b r e

2 0 0 7

H Sommaire Chapitre 1. Une nouvelle loi antidiscrimination

p. 4

Chapitre 2. Ma vie privée est-elle protégée ?

p. 6

Chapitre 3. Les droits du patient

p. 10

Chapitre 4. Le travail, c’est la santé...

p. 12

Chapitre 5. Sida et sécurité sociale

p. 16

Chapitre 6. Enfance, adolescence et VIH

p. 18

Chapitre 7. Les migrants face au VIH-sida : une situation de vulnérabilité

p. 21

Chapitre 8. CPAS et VIH

p. 24

Chapitre 9. Sida et prison

p. 26

Interview du Directeur du Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme

p. 28

Chapitre 10. Assuré pour se rassurer, ce qui est possible

p. 30

Chapitre 11. Le VIH en voyage : un bagage encombrant ?

p. 32

Chapitre 12. Le droit au logement

p. 33

Chapitre 13. Pour le meilleur et pour le pire

p. 34

Quelques contacts utiles

p. 36

Notes

p. 39

H Avertissement Les éditeurs de cette brochure et le groupe de travail qui a accompagné sa réalisation ont eu comme objectif principal de permettre aux personnes séropositives et malades du sida de faire valoir leurs droits dans différents secteurs de la vie sociale. En effet, si le dispositif légal et les diverses réglementations mentionnées dans cette brochure garantissent une certaine protection des personnes atteintes dans différents domaines, l’observation de la réalité quotidienne montre que cette protection est parfois bafouée ou ignorée, volontairement ou non, par certaines institutions. C’est pourquoi les diverses lois et réglementations sont rappelées dans les textes présentés ici. En parallèle à ces réglementations, quelques témoignages ont été choisis pour mettre en évidence les décalages qui peuvent exister entre les théories et la pratique. Ces décalages peuvent provoquer des situations de discrimination inacceptables. Si la lutte contre les discriminations peut faire évoluer les institutions et les mentalités, elle présente certains obstacles. Parmi ceux-ci, l’un des plus problématiques est sans conteste celui de la publicité des débats. En effet, les personnes séropositives qui choisissent d’être discrètes vis-à-vis de leur entourage à propos de leur état de santé osent rarement prendre le risque de se battre à visage découvert. Ce choix est compréhensible et légitime. Il montre cependant bien que le combat pour faire valoir ses droits est un combat difficile, qui n’est pas à la portée de tous.

H Editorial Il n’existe pas de législation spécifique au sida en Belgique, mais plusieurs dispositions légales du droit commun régissent des situations délicates fréquemment rencontrées par les séropositifs et les malades du sida : secret médical, protection de la vie privée, relations de travail, assurances, soins de santé, etc. Comme tout citoyen, les personnes séropositives jouissent de droits et en retour ont certains devoirs tels que veiller à ne pas mettre la santé d’autrui en danger ou respecter la vie privée de ses proches. La loi régit la vie sociale et les comportements des individus en établissant des principes, en édictant des règles parfois très précises, parfois beaucoup plus générales. Les lois sont généralement précisées par des arrêtés royaux, par des arrêtés ministériels, par des décrets des Régions ou des Communautés, par des circulaires ministérielles qui explicitent le droit et tentent d’en adapter l’application à la réalité concrète. Enfin, le pouvoir judiciaire joue un rôle important dans la mise en pratique du droit. À l’occasion de conflits qui surgissent entre individus, ou entre un individu et une institution, les cours et tribunaux sont appelés à interpréter les lois et règlements en conformité avec leur esprit. Le droit n’est donc pas une matière figée. Il évolue au gré des décisions politiques et de son application par les juges. Les décisions judiciaires forment ce qu’on appelle la jurisprudence, qui influence ensuite les jugements et arrêts pris ultérieurement. Les séropositifs et les malades du sida qui se trouvent dans une situation litigieuse (à propos d’un problème de vie privée, d’emploi, de logement...) ne doivent donc pas trop vite baisser les bras. Faire appel à la justice implique encore des procédures longues et, éventuellement, coûteuses. Si le problème d’accès à la justice n’est pas encore résolu, aujourd’hui, un premier conseil juridique gratuit est accessible à tous. Et puis, il n’est pas inutile de chercher des solutions à l’amiable en faisant appel aux services de médiation. Faire valoir ses droits, aussi bien face à des individus qu’à l’égard d’institutions ou du pouvoir politique, c’est aussi contribuer à faire évoluer la société. Preuve en est la nécessité de réactualiser cette brochure six ans après sa première édition. Depuis 2001, le droit a évolué, souvent positivement. Par exemple, en 2001, la Plate-Forme avait rédigé un article sur la cohabitation des couples homosexuels et comment ils pouvaient défendre leurs droits en termes de succession. Aujourd’hui, les couples homosexuels bénéficient des mêmes droits que tous les autres couples et peuvent se marier. L’avancée la plus prometteuse est sans doute la nouvelle loi antidiscrimination qui, dorénavant, condamne une discrimination basée sur l’état de santé actuel ou futur d’une personne. Celle-ci est révélatrice d’un changement de mentalité qui peut paraître lent, mais qui est réel. Nous espérons devoir, d’ici quelques années, réactualiser à nouveau cette brochure, dans le bon sens ! Nous espérons que ces quelques pages vous aideront à mieux connaître vos droits et à les défendre si nécessaire.





Connaître & faire valoir ses droits

Ni l’asbl Plate-Forme Prévention Sida, ni les auteurs, ni quiconque agissant en leur nom ne peut être tenu pour responsable de l’usage qui pourrait être fait des informations contenues dans cette publication. Les éléments repris dans cette brochure sont donnés à titre indicatif et de toute bonne foi. Le médecin et le pharmacien sont seuls compétents pour tout conseil individuel et personnalisé. Coordination : Thierry Martin / Geneviève Georges Conception graphique : Cayenne Pub & co et Laurence Jacmin Photographies : Alain Kazinierakis ; One Vision 2007 Brisol-Myers Squibb ; Manuel Abramowicz, CECLR. Rédaction : éd. 2001 Jean-Paul Vankerberghen / éd. 2007 textes actualisés ou réécrits par Frédéric Arends, Yves Dario, Nathalie Denies, Anne De Waele, Geneviève Georges, Isabelle Jaramillo, Bénédite Saigot. Interviews réalisées par Geneviève Georges, Vladimir Martens. Relecture orthographique : Bernard Crépin, FB Design Remerciements : L’actualisation de cette brochure réalisée par l’asbl Plate-Forme Prévention Sida a été rendue possible grâce à la participation des associations suivantes : Coordination provinciale Sida Assuétudes de Namur, Espace P, Ex Aequo, Lhiving, Modus Vivendi, Service Education pour la Santé, Sid’Action Pays de Liège, Siréas. Et la collaboration des Centres de référence sida du CHU de Charleroi, du CHU de Liège, du CHU de St Pierre, des Cliniques Universitaires St Luc, ainsi que de l’Observatoire du Sida & des Sexualités des Facultés universitaires St Louis. Nous tenons à les remercier tous sincèrement. Nous tenons à remercier tout particulièrement le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme (CECLR) pour leur aide précieuse et tout leur temps investi dans l’actualisation de la présente brochure. Pour leur relecture attentive et leurs précieux conseils, merci aussi à : Nicolas Bernard, professeur aux Facultés universitaires St Louis ; Jean-Paul Charlier, direction réglementation chômage, ONEM ; Fabienne Cornet, consultante en travail social ; Yves Dario, Discrimination non raciale, CECLR ; Nathalie Denies, Discrimination non raciale, CECLR ; Michaël Dewitte, inspecteur médical, Service des soins de santé prisons, SPF Justice ; Ellen Druyts, coordinatrice de Medimmigrant asbl ; Pierre Fastenakel, ancien conseiller du ministre des Affaires sociales et de la Santé publique Rudy Demotte ; Mieke Fierens, directrice de la Ligue des usagers des services de santé, LUSS ; Dr Anne-Françoise Gennotte, Centre de référence sida au CHU St Pierre ; Rita Glineur, Chef de cabinet de Yvan Mayeur, président du CPAS de Bruxelles ; David Haerry, The European AIDS Traitment Group (EATG) ; Julie Lejeune, Observatoire des migrations, CECLR ; Khadija Ounchif, service social, Centre de référence sida au CHU St Pierre ; Olivier Rijckaert, avocat au barreau de Bruxelles ; Pascale Thiange, service social, Centre de référence sida au CHU St Pierre ; Dr Brigitte Vanthournout, service de pédiatrie, CHU St Pierre ; Myriam Vastman, service social du Siréas ; Marie-Noëlle Verhaegen, Service de médiation “Droit du patient” ; La Commission de la protection de la vie privée. Merci aussi à toutes les personnes séropositives, adultes et jeunes, qui ont accepté de partager leur avis et recommandations pour la réactualisation de la présente brochure. Enfin, un tout grand merci aux personnes qui ont accepté de témoigner. Afin de préserver leur intimité, certaines ont choisi de ne pas montrer leur vrai visage dans cette brochure. Éditeur responsable : Thierry Martin, Plate-Forme Prévention Sida, Av. Émile de Béco, 67 1050 Bruxelles. Cette publication Faire valoir ses droits a pu être réalisée grâce au soutien des laboratoires pharmaceutiques suivants : Abbott - Boehringer Ingelheim - Bristol-Meyers Squibb GlaxoSmithKline - Merck Sharp & Dohme - Pfizer, Roche - Tibotec, une division de Janssen-Cilag et UCB Pharma. Plate-Forme Prévention Sida - Av. Émile de Béco, 67, 1050 Bruxelles. Tél. : 02 733 72 99 - e-mail : [email protected] - www.preventionsida.org

1

 U ne nouvelle loi © Alain Kazinierakis

antidiscrimination Depuis le 10 mai 2007, une nouvelle loi antidiscrimination est entrée en vigueur. Celle-ci peut s’appliquer à tous les cas avérés de discrimination fondée sur l’état de santé actuel ou futur. Elle concerne donc les personnes vivant avec le VIH.

Un conseil pratique  ?

H

J’ai été victime de discrimination, que faire ? Où m’adresser ? La loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination peut vous permettre de vous défendre. Afin de vous soutenir dans vos démarches, vous pouvez contacter le service “Discriminations non raciales” du Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme.Ce service enregistre les plaintes, accueille les victimes et les conseille après avoir analysé les situations rapportées. Il peut mener des conciliations et éventuellement, dans certains cas, déposer plainte devant les tribunaux, avec l’accord de la victime. Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme Rue Royale, 138 - 1000 Bruxelles Tél.  : 02/212.30.00 - Ligne verte (plaintes) : 0800/12.800 - Fax : 02/212.30.30 E-mail : [email protected] Web : www.diversite.be D’autre part, vous pouvez également faire appel à l’aide juridique de première ligne qui vous donnera gratuitement un premier conseil juridique. Ce service est accessible via les maisons de justice ou les Bureaux d’aide juridique. Pour obtenir les coordonnées utiles de ces services dans votre région, consultez le site du SPF Justice : www.just.fgov.be. (1) Voir à ce propos Cons. Nat. de l’Ordre, Maladies transmissibles – Secret professionnel – Service 100 – Sida, Rev. Dr. Santé, 20012002, p. 59 et s. 

VIH ET DROITS

La loi a une portée très large. Elle vise de nombreuses situations de discriminations dans des champs aussi divers que l’accès aux biens et aux services (le logement, l’horeca, les assurances...), l’emploi dans tous les secteurs ou la participation à toute activité, qu’elle soit économique, sociale, culturelle ou politique, pour autant qu’elle soit ouverte au public. Parmi les activités visées, il y a, par exemple, le fait de participer à une compétition sportive ou de s’inscrire à des cours de cuisine...

englober des maladies invalidantes et chroniques telles que le sida.

Discriminer, c’est quoi ?

Concrètement, ces aménagements peuvent être matériels (installation d’une rampe d’accès, par exemple) mais ils peuvent aussi viser une adaptation des horaires de travail, une répartition de tâches, voire, dans certains cas, une diminution du temps de travail, etc.

Selon la loi, discriminer c’est : traiter une personne de manière moins favorable qu’une autre dans une situation comparable, en raison, par exemple, de son état de santé, sans que cela ne se justifie. On ne pourra accepter une différence de traitement sur base de l’état de santé d’une personne que si elle peut être objectivement justifiée par un but légitime, des moyens appropriés et nécessaires et des moyens proportionnés. L’appréciation se fera au cas par cas. Par exemple, en évaluant une situation concrète, on pourra justifier le refus d’embaucher une personne séropositive pour une profession médicale dans laquelle la pratique des interventions invasives1 est très fréquente. On pense, par exemple, aux métiers de gynécologue ou de chirurgien.

Dans ce cadre, la loi précise que l’absence d’aménagements raisonnables pour les personnes souffrant d’un handicap peut constituer une discrimination, sauf si ces aménagements représentent une charge disproportionnée pour celui qui doit les adopter ou s’ils peuvent être compensés par des mesures existantes.

Que faire si je suis victime de discrimination ? Les comportements indésirables liés à l’état de santé qui ont pour effet de porter atteinte à la dignité de la personne et de créer un environnement intimidant, hostile, dégradant, humiliant ou offensant peuvent aussi être couverts par la loi ; on parlera alors de harcèlement discriminatoire.

L’aménagement “raisonnable”, c’est quoi ? Le handicap est un des critères

Dans certains cas, la loi donne aux victimes de discriminations le droit d’agir en justice devant le juge civil. On pense, par exemple, à un propriétaire qui refuserait de louer son appartement à une personne malade du sida car il craint la réaction des autres locataires s’ils l’apprenaient.

retenus par la loi pour pouvoir demander des aménagements raisonnables. Cette notion de handicap peut être interprétée d’une façon assez large pour

Dans ce cas, s’il reconnaît la discrimination, le juge pourra octroyer des dommages et intérêts

forfaitaires à la victime et ordonner à l’auteur de la discrimination d’arrêter celle-ci. Pour protéger la victime et ceux qui accepteraient de témoigner de la discrimination, la loi prévoit des dispositifs de protection contre les représailles.

le cas lorsqu’une personne malade est victime de violence ou de harcèlement en raison de sa maladie ou encore quand une personne incite ou encourage d’autres personnes à discriminer ou à commettre des violences à l’égard d’une personne malade. w w w. pr eventions ida. org

Mais dans les cas les plus graves, la loi donne également le droit d’agir devant le juge pénal. Ce sera

H Témoignage Hervé, 33 ans Je suis séropositif depuis 1986. La première année de ma maladie, je n’ai pas dû prendre de traitements puis j’ai commencé des traitements légers que je supportais bien. Un jour, mon immunité a fortement chuté et mon médecin m’a proposé une autre combinaison de médicaments. J’ai commencé à avoir des problèmes digestifs, à être très fatigué et très faible. J’avais à peine le temps de récupérer pendant les week-ends pour recommencer à travailler. J’ai alors pris conscience que je devais réduire mon temps de travail si je voulais tenir le coup. J’ai alors pris des renseignements, avec l’aide de mon médecin et du service social de l’hôpital.

Je lui ai donc demandé un jour de congé par semaine sans réduction de salaire. En échange, j’acceptais de ne pas avoir d’augmentation pendant un certain temps. J’ai évidemment beaucoup hésité sur la manière de lui présenter les choses. Soit je pouvais lui dire que c’était pour convenance personnelle,

J’ai alors pris conscience que je devais réduire mon temps de travail si je voulais tenir le coup

Après mûre réflexion, j’ai décidé de parler de ma situation à mon employeur. Il faut dire que mon patron a une personnalité assez exceptionnelle et que je m’entends très bien avec lui. En outre, mon secteur d’activités est un secteur de pointe, ce qui permet souvent de négocier avec plus de confort que dans des secteurs plus difficiles.

soit je lui parlais franchement de mon état de santé et de ma séropositivité. Depuis, je travaille quatre jours par semaine et je me sens nettement mieux. Je peux profiter de mon jour de congé pour aller voir mon médecin tranquillement et pour prendre soin de moi. Je suis bien conscient du fait que ma situation est assez exceptionnelle. Dans un autre secteur d’activités ou avec un autre patron, ma demande n’aurait certainement pas été accueillie aussi favorablement.

principales sources > Loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination, M.B. 30/05/2007

VIH ET DROITS



2

 M  a vie privée

est-elle protégée ? La loi protège la vie privée de chacun mais les écarts entre les grands principes et la réalité concrète du terrain sont cruellement vécus

© Alain Kazinierakis

par les personnes séropositives. Dès lors, rappeler certaines lois ou articles du code pénal peut être utile.

Les grands principes De nombreux textes légaux garantissent la protection de la vie privée des citoyens, qui inclut le droit pour l’individu de garder secrètes les informations sur son état de santé. Ces principes sont défendus par l’article 22 de la Constitution belge et par la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée1. Plus récemment, la nouvelle loi du 22 août 2002 sur le droit des patients a rappelé ce principe : la vie privée du patient doit toujours être respectée. L’article 7 de la loi de 1992 est spécialement consacré aux données relatives à la santé. Celles-ci ne peuvent être traitées que dans certaines hypothèses spécifiques et, notamment, lorsque le traitement des données est nécessaire aux fins de médecine préventive, de diagnostics médicaux, de l’administration de soins ou de traitements ; en ce cas, les données doivent être traitées sous la surveillance et la responsabilité d’un praticien de l’art de guérir. Par ailleurs, l’article 458 du Code pénal garantit le secret professionnel. Il interdit aux “médecins, chirurgiens, officiers de santé, sages-femmes, et toutes autres personnes dépositaires, par état ou par profession, des secrets qu’on leur confie” de dévoiler ceux-ci à des tiers, sous peine d’une amende et/ou d’un emprisonnement de 8 jours à 6 mois.

(1) Modifiée par la loi du 23/06/2006 mettant en place une Commission de la protection de la vie privée. 

VIH ET DROITS

Qui est tenu par le secret professionnel ? La Cour de cassation a adopté une interprétation large en qui concerne les personnes soumises à l’obligation de garder un secret tel qu’énoncée dans l’article 458 du Code pénal : “l’article doit être appliqué indistinctement

à toutes personnes investies d’une fonction ou d’une mission de confiance, qui sont constituées par la loi, la tradition ou les mœurs, dépositaires des secrets qu’on leur confie.” Ainsi, tant les médecins que les infirmiers, les dentistes, les pharmaciens, mais encore les avocats, les psychologues, les assistants sociaux, les éducateurs, les enseignants, les chefs d’établissements scolaires, les employés d’un hôpital ou d’une mutuelle peuvent être, au regard de l’article 458 du Code pénal, assimilés à des personnes dépositaires par état ou par profession des secrets qu’on leur confie. Cette liste n’est donc pas exhaustive.

Que couvre ce secret professionnel ? En prenant l’exemple classique du médecin, le secret couvre l’ensemble des informations dont le médecin est dépositaire dans l’exercice de sa profession ; tout ce que le patient lui a dit ou confié, ainsi que tout ce dont le médecin a pris connaissance à la suite d’examens ou d’investigations auxquels il a procédé ou fait procéder. Le secret s’étend à tout ce qu’une personne, a vu, connu, appris, constaté, découvert ou surpris dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de sa profession. Par exemple, les documents de remboursement d’analyses ou de traitements spécifiques au sida permettent aux employés des mutuelles qui les reçoivent de supposer que tel assuré est séropositif ou malade du sida. Ces employés sont soumis au secret professionnel et ne sont pas autorisés à rapporter à l’extérieur des données confidentielles.

À qui le résultat d’un test de dépistage peut-il être transmis ? Les résultats des tests réalisés en laboratoire ne sont envoyés qu’au médecin qui a prescrit l’analyse. Ce médecin est soumis au secret professionnel médical. Il ne peut donc pas communiquer le résultat d’un test sans l’accord préalable de son patient. Dans le cadre des soins à administrer à un patient, le médecin est autorisé à partager ce secret avec les autres soignants, à trois conditions : que cette information soit donnée dans l’intérêt du patient ; qu’elle soit faite à une personne qui concourt directement ou indirectement aux soins ; que le patient ne s’y soit pas opposé. Tous ces soignants sont tenus au même secret. Il n’est donc pas permis de révéler la séropositivité d’un patient à des médecins ou infirmiers qui ne font pas partie de l’équipe soignante. La loi relative aux droits des patients donne aussi le droit d’être informé de manière éclairée avant toute intervention : cela comprend le dépistage du VIH et implique que personne ne peut être dépisté à son insu, même par les forces de l’ordre ou toute autre autorité publique.

Un médecin peut-il intervenir si j’ai un comportement à risque ? Un médecin a le devoir d’informer au mieux le patient qui s’est confié à lui des risques qu’il prend et fait courir à ses proches. Son objectif doit être de l’aider, en dialoguant avec lui, à intégrer au mieux des mesures de prévention dans son mode de vie. Il doit aussi l’encourager fermement à faire part de sa séropositivité à son ou à ses partenaires, éventuellement en lui proposant une aide pour le faire. Le 3 février 2007, l’Ordre des médecins a revu sa position sur la question en permettant au médecin d’invoquer l’état de nécessité pour transgresser le secret médical. Le cas particulier de la protection d’un partenaire sexuel stable peut constituer pour le médecin cet état de nécessité s’il est informé, par ailleurs, que son patient séropositif refuse de prendre les mesures nécessaires pour éviter de contaminer son partenaire. Cependant, cette démarche ne peut être réalisée qu’exceptionnellement et le médecin a certaines obligations à suivre, dont : informer le patient de sa responsabilité civile et pénale ; consulter un confrère expert dans la prise en charge des patients séropositifs ; enfin, avertir au préalable le patient du fait que son partenaire sera informé. L’Ordre des médecins a aussi rappelé qu’en l’état actuel de la déontologie et de la loi (Code pénal),

tout patient bénéficie du secret professionnel médical et que la séropositivité ne constitue pas en soi un critère d’exception.

Y a-t-il des exceptions au secret professionnel ? En théorie, seul le maître du secret2 peut délier du secret un médecin ou un autre professionnel. C’est d’ailleurs ce que pourra demander un assureur, par exemple, avant de signer un contrat. (Lire aussi : “Assuré pour se rassurer”). Le praticien peut aussi être amené à donner certaines informations à la “personne de confiance” clairement désignée par le patient (doué de discernement), si ce dernier en fait la demande. Il existe des exceptions légales au secret médical, dans des limites expressément prévues par les lois, qui obligent le dépositaire du secret à le révéler. Il revient cependant au médecin d’apprécier en conscience si le secret professionnel médical l’oblige à ne pas communiquer certains renseignements. > Parmi les exceptions, il y a l’obligation de communiquer aux médecins inspecteurs ou conseils de l’INAMI ou des mutuelles les renseignements nécessaires à l’exercice de leur mission. Ces médecins de l’INAMI et des mutuelles sont à leur tour tenus au secret médical. > Le médecin est aussi tenu de délivrer des certificats médicaux réglementaires, par exemple en matière d’accidents du travail, de maladies professionnelles ou d’assurances.

© Alain Kazinierakis

> Le médecin peut aussi communiquer un diagnostic ou des renseignements médicaux au représentant légal ou de fait du patient, si celui-ci est incapable juridiquement ou dénué de discernement3. > En principe, le décès du patient ne relève pas le médecin du secret professionnel ; les héritiers ne peuvent l’en délier, ni en disposer. > Enfin, le médecin appelé à témoigner devant les tribunaux sur des faits couverts par le secret professionnel a le choix de parler ou de refuser de le faire en invoquant ce secret. Malheureusement, les critères déterminant ce choix ne sont pas clairs, ni dans la théorie, ni dans la pratique.

(2) Le maître du secret est la personne qui s’est confiée. (3) Par exemple : un jeune enfant, une personne souffrant d’un handicap mental.

VIH ET DROITS



Les médecins doivent-ils déclarer à l’État les personnes séropositives ou malades du sida ? Pour mieux comprendre l’évolution de l’épidémie dans le pays, les médecins et les laboratoires de référence sont invités à faire une déclaration volontaire des cas, mais avec une garantie de confidentialité. Cette déclaration ne reprend que des données anonymes : âge, sexe, nationalité, mode présumé de contamination, nombre de T4. Ces déclarations, toujours enregistrées sous la responsabilité de médecins, permettent un suivi épidémiologique. e t m a c a r t e sis La carte SIS ne contient pas de données médicales. Elle ne contient que des informations d’ordre administratif et sert à voir si vous êtes en ordre par rapport à l’assurance maladie invalidité

Et mon dossier médical informatisé ? La loi sur la protection de la vie privée s’applique à toute tenue de fichier, qu’il soit manuel ou automatisé ; elle réglemente de manière précise la manière dont des données à caractère personnel peuvent faire l’objet d’un traitement informatisé. Celui-ci ne peut être réalisé que “pour des finalités déterminées et légitimes.” Conseil pratique

H

Lorsque vous demandez un certificat à votre médecin, précisez bien le motif. Est-ce pour certifier qu’il n’y a pas de contreindication pour pratiquer un sport ? Il est inutile de donner plus de détails que nécessaire. Vous pouvez demander à votre médecin d’utiliser un papier à entête discret, où ne figure pas sa spécialisation (p. ex. : “médecine interne”).

Dans certains centres et hôpitaux, les données médicales sont strictement protégées par des mots de passe et des clés d’accès que seuls les médecins détiennent. Dans d’autres hôpitaux, les données sont moins bien protégées et accessibles au personnel administratif. En cas de doute, le mieux est de poser la question au médecin et d’exprimer son souhait de confidentialité.

e t si j a m a is . . . Et si jamais, un jour, cela se sait ? Votre séropositivité a été divulguée par une personne dépositaire de votre secret, à titre professionnel ou même personnel, et vous estimez qu’elle vous a causé un préjudice en répétant intentionnellement la nouvelle auprès de votre patron, vos collègues ou votre entourage. On imagine souvent à tort, que “diffamation et calomnie” sont condamnées parce qu’il est condamnable de raconter des mensonges. Or, ce qui est puni par la loi, c’est qu’un fait précis (vrai ou faux) a été méchamment imputé à une personne et que ce fait est de nature à porter atteinte à l’honneur de cette personne ou à l’exposer au mépris public (article 443 du Code pénal). Si vous pensez être victime de diffamation et calomnie, vous pouvez porter plainte à la police ou écrire au procureur du Roi. Ce dernier décidera s’il est nécessaire ou non d’entamer des poursuites. Au préalable, demander éventuellement conseil à un avocat pour décider de la meilleure marche à suivre.

Criminalisation de la transmission du VIH, qu’est-ce que c’est ? Depuis quelques années, on parle parfois dans la presse de criminalisation4 de la transmission du VIH. En France, en Angleterre, en Suisse ou en Suède, des personnes séropositives ont été condamnées pour avoir eu des rapports sexuels non protégés. Les plaignants, contaminés ou non suite à ces rapports, ont argumenté que leur partenaire se savait contaminé(e) et ne leur avait rien dit. À ce jour (septembre 2007), il n’y a pas eu de cas en Belgique. Tous ces procès se sont déroulés à l’étranger : ils ne concernent donc pas la jurisprudence belge. Cette évolution est contreproductive en termes de santé publique. Comme le souligne l’ONUSIDA : “cela stigmatise les personnes séropositives et déresponsabilise la population générale.” Aujourd’hui, en Belgique, en ce qui concerne la vie privée, rien n’oblige une personne séropositive à dévoiler son statut sérologique. Cependant, si la personne séropositive connaît son statut sérologique et qu’elle contamine son ou sa partenaire, elle pourrait – théoriquement – être poursuivie pour coups et blessures.

(4) Criminaliser : faire passer de la juridiction correctionnelle ou civile à la juridiction criminelle. (Petit Larousse)

w w w. pr eventions ida. org

principales sources > L oi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l’égard des traitements de données à caractère personnel. > Loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient. > C ode pénal : Articles 458 & 458 bis (secret professionnel) - Chapitre V : articles 443 et suivants (diffamation et calomnie). > C ode déontologie médicale, Titre II, Chapitre V, le secret professionnel du médecin. 

VIH ET DROITS

> D écision de l’Ordre des médecins (03/02/2007).

H Témoignage Je m’appelle Judith, j’ai 56 ans. Je suis arrivée en Belgique il y a 11 ans, dans des circonstances mêlant étroitement raisons de guerre et problèmes de santé. Je cumule donc les difficultés liées à l’exil et au sida. L’exil m’a coupée de tout: mon environnement familial, social, professionnel et géographique. Du jour au lendemain, je suis passée du statut de cadre à celui d’assistée, dans un pays qui, par la force des événements, est devenu le mien. Je n’y avais jamais vécu auparavant, ni même envisagé d’y vivre. J’avais encore moins pensé mourir loin des miens, éparpillés dans le monde entier, sans l’avoir choisi. C’est une situation effrayante, une souffrance indescriptible, d’être ainsi séparée de tout ce qui a jusque là peuplé votre univers. N’appartenir à aucun noyau familial, devenir tout doucement une étrangère aux yeux de ceux qui vous étaient proches. C’est presque invivable, parfois. C’est là que j’ai compris le sens des mots “apatride” et “isolement”. Le sida m’a volé ma santé, ma vitalité, ma jeunesse. Il m’a plongée dans un monde d’incertitude, d’angoisse, de douleur, d’insécurité physique, mentale et de profonde solitude, où la vie et la mort se chevauchent, dans chaque geste de la vie quotidienne. L’enchevêtrement de la vie et de la mort est inexplicable à ceux qui ne l’ont pas vécu. C’est sans doute ce qui cause l’isolement. Réflexion faite, on est toujours seul dans la souffrance. Ce duo explosif d’exil et de sida fait le lit de toutes les discriminations, du déni des droits les plus élémentaires. Lors de mon évacuation forcée en octobre 1996, sortie trop tôt de l’hôpital pour m’enfuir, effrayée et chassée de mon propre pays, j’ai été spoliée par mon employeur de la moitié d’une somme négociée, arrachée à la hâte. J’en avais désespérément besoin pour financer ma fuite vers l’inconnu.

Tribunal du travail condamna à payer. Une action en justice entamée dans mon pays condamnait également mon employeur à régler ces frais. J’étais trop faible pour m’en occuper, et laissais le gouvernement belge régler cette affaire, dont l’injustice me dépassait. Quant à la somme spoliée à la veille mon évacuation forcée, elle me reste toujours en travers de la gorge, et mes courriers de réclamation sont jusqu’à ce jour restés sans réponse. Le plus surprenant est ce silence qui vous donne presque l’impression de ne plus exister, d’être enterrée vivante. Deux ans après le premier procès, je retournai au Tribunal du travail pour la remise en question de mon handicap par un médecin expert du Ministère de la santé qui, sans se donner la peine de m’ausculter, trouva que j’avais trop bonne mine pour une malade du sida. Ce fut une horreur absolue de prouver ma bonne foi, devant un expert médical désigné par le Tribunal du travail, en présence de ce médecin expert du Ministère de la santé, de l’assistante sociale de la Ligue Braille, de mon jeune avocat. Les rapports médicaux, fournis par l’infectiologue, le diabétologue, l’ophtalmologue et l’expertise du kinésithérapeute, ne suffirent pas à convaincre. On se demande comment un médecin peut remettre en cause la crédibilité de ses confrères. Il me fallut baisser mon pantalon, pour prouver ce qui était bien spécifié dans les rapports du kiné et de l’infectiologue, à savoir l’état désastreux de mes jambes, déformées par la paralysie et les effets secondaires des médicaments. Tant d’efforts, d’humiliations, pour faire valoir son droit au statut d’handicapée...

C’est dans ces conditions surréalistes que je suis arrivée en Belgique en novembre 1996, avec comme bagages un jeans et cinq T-shirts. J’ai aussitôt entrepris des soins médicaux onéreux en ambulatoire ainsi que mes démarches de demande d’asile.

Je ne crois pas que je pourrai faire à nouveau valoir mes droits dans ces conditions, ni me défaire de ma colère et de ma révolte pour ces traitements dégradants. Sans le soutien de mon jeune avocat, de mon médecin, de mon kiné et de l’assistante sociale, j’aurais sûrement baissé les bras avant mon pantalon. Nous n’aurions pas gagné ce procès.

Un mois plus tard, durant la période des fêtes, épuisée, à peine remise de ma cavale et de ma dernière hospitalisation, je me suis retrouvée aux urgences pour une méningite mal soignée. J’avais dû interrompre le traitement pour fuir. Les médicaments qui auraient pu m’aider n’étaient plus à ma portée.

Ceci pour démontrer la difficulté de faire valoir ses droits en tant que personne exilée vivant avec le VIH, puisque nous n’avons même plus de considération en tant qu’être humain responsable. Avec le sida nous perdons notre statut d’adulte responsable, le respect dû à l’humain.

Au cours de l’hospitalisation, médecins et comptables se succédaient à mon chevet. Les uns, visiblement préoccupés par mon état, me prodiguaient des soins. Les autres me réclamaient une caution hebdomadaire de 200.000 FB que je ne pouvais pas trouver du fond de mon lit.

Pour la plupart d’entre nous, nous sommes des survivants du sida. Après avoir vaincu la mort, fait le deuil de notre deuil, on nous reconnaît certes “le droit à la vie”, mais pas “le droit de vivre”. Nous sommes dépossédés même de notre maladie, de notre sida.

Au bout de deux mois d’hospitalisation, ne pouvant plus rien pour moi, on me renvoya chez moi, aveugle et paralysée, avec une dette de plus de deux millions de francs belges pour les soins reçus. Ce fut un cauchemar. Ma famille à l’étranger fut poursuivie pour régler cette dette dont j’étais dans l’incapacité physique de m’acquitter. Ces factures furent envoyées à mon ancien employeur en Afrique. Il ne daigna pas répondre, même pour dire qu’il refusait de les régler. Elles furent aussi transmises au CPAS de ma commune, que le

Devant ces discriminations conscientes ou inconscientes, visibles ou invisibles, très souvent sournoises, comment pourrions-nous faire valoir nos droits sans avoir “le droit d’exister” ? Comme le dit si bien Aminata Traore : “Il n’y a pas dépossession plus grave que celle qui interdit à un sujet l’accès à la question qui le concerne.” VIH ET DROITS



  Les droits du patient © Alain Kazinierakis

3

La Belgique est le sixième pays européen à s’être doté d’une loi relative aux droits du patient. Elle est entrée en vigueur le 6 octobre 2002. Cette loi a l’avantage de rassembler tout ce qui a trait aux droits du patient en un seul texte.

Quels sont mes droits vis-àvis des soignants ? La nouvelle loi

Un médecin peut-il refuser de me soigner ? Cela dépend de la

veut aider le patient à se situer plus clairement par rapport à ses droits dans sa relation avec les prestataires de soins et à gérer sa santé en connaissance de cause : la relation patient soignant est en quelque sorte rééquilibrée. Cette loi entend offrir une meilleure protection au patient en le (re)-plaçant au centre des soins de santé. Les droits ainsi confirmés ou renforcés par le législateur sont principalement :

situation : y a-t-il urgence ou non ? S’il y a urgence, un médecin, qu’il soit généraliste ou quelle que soit sa spécialité, ne peut se soustraite à son devoir de porter secours à un malade en danger immédiat (art. 6 du Code de l’Ordre des médecins).

> le droit à des prestations de qualité ; > le droit au libre choix du dispensateur de soins ; > le droit d’être informé sur son état de santé ; > le droit de consentir de manière éclairée (après avoir été suffisamment informé) à toute intervention ; > le droit de consulter directement son dossier médical (notamment pour être informé et consentir en connaissance de cause) ; > le droit au respect de sa vie privée et de son intimité ; > le droit à des soins visant à soulager la douleur ; > le droit d’introduire une plainte auprès d’une fonction de médiation compétente.

(1) avec un risque de saignement important.

10

VIH ET DROITS

Si le patient a le droit d’obtenir et de comprendre toutes les informations le concernant, inversement, pour soigner correctement, un médecin a lui aussi besoin d’obtenir toutes les informations utiles sur l’état de santé de son patient. Ceci signifie qu’il doit connaître son statut sérologique, même si la consultation concerne une toute autre question de santé. Dans le cas contraire, on court le risque d’une mauvaise interprétation des symptômes, ou encore d’une interaction dangereuse entre des médicaments prescrits et les traitements antirétroviraux.

Par contre, “hors le cas d’urgence et celui où il manquerait à ses devoirs d’humanité, un médecin a toujours le droit de refuser des soins pour des raisons professionnelles ou personnelles” (art. 28 du Code). Cependant, le médecin doit s’assurer de la continuité des soins et doit fournir toutes les informations utiles au médecin qui lui succède.

N’y a-t-il aucune exception à l’interdiction du test à l’insu ? La règle qui interdit le test à l’insu vient d’être renforcée par la nouvelle loi : le droit de consentir de manière éclairée (après avoir été suffisamment informé) à toute intervention. Le test VIH n’échappe pas à cette règle. Ce qui signifie que le médecin ne peut se contenter d’un accord obtenu à la sauvette, mais qu’il doit expliquer à son patient les raisons de cet acte et ses conséquences éventuelles. En cas de résultat positif, le médecin devra aussi veiller à ce que le patient reçoive l’aide et l’information nécessaires pour qu’il bénéficie d’un suivi et d’une prise en charge de qualité. L’urgence peut constituer une exception à la règle : si une intervention chirurgicale invasive1 s’impose en urgence, “la protection du personnel médical et infirmier justifie le dépistage de la séropositivité”, précise l’Ordre.

Que se passe-t-il si un patient refuse un test alors que le médecin considère qu’il s’agit d’une mesure de précaution nécessaire (avant une opération par exemple) ? Interrogé sur ce cas de figure, l’Ordre des médecins a répondu qu’un test ne peut avoir lieu si le patient s’y oppose expressément. Mais, à son tour, le médecin sera libre de refuser cette personne en tant que patient (sauf cas d’urgence). w w w. pr eventions ida. org

G

G

Contacts utiles

Service médiation fédéral “Droit du patient” (c/o SPF Santé publique, Direction générale des Établissements de soins) Vous pouvez vous adresser à ce service de médiation pour toutes vos plaintes sur la violation des droits du patient par des prestataires de soins et pour lesquelles aucun autre service n’a été mis sur pied. Eurostation, bloc2 - Place Victor Horta, 40, bte 10 - 1060 Bruxelles Tél. : 02/524 85 21 - Fax : 02/534 85 38

Conseil pratique

Vous cherchez un dentiste, un médecin généraliste, un gynécologue… qui vous comprendra, en qui vous pouvez avoir confiance en tant que personne séropositive ? Votre médecin spécialiste VIH qui vous suit connaît peutêtre un confrère qu’il peut vous recommander.

LUSS asbl (La Ligue des usagers des services de santé) L’objectif principal de la LUSS est de donner la parole aux usagers et de faire entendre celle-ci. Elle met tout en œuvre pour relayer cette parole auprès des autorités politiques et autres acteurs de la santé. Av. Sergent Vrithoff, 123 - 5000 Namur Tél. : 081/74.44.28 - Fax : 081/74.47.25 - E-mail : [email protected]

H Témoignage Eric, 40 ans Je suis marié et j’ai trois enfants. Je suis malade du sida depuis © Alain Kazinierakis une dizaine d’années. J’ai été l’un des premiers patients sous trithérapie mais aujourd’hui j’ai arrêté les traitements à cause longtemps, alors qu’elle est fausse en plus d’être stigmatisante. Je des effets secondaires. J’ai connu les tout débuts du sida. Je me ne suis pas soigné de la même façon que les malades “normaux”. souviens des grands sacs rouges que l’on plaçait à la porte des Pour les médecins, je ne suis qu’un toxico qui a le sida. chambres des personnes contaminées. On vivait dans un climat de discrimination très forte, due en partie à la peur que suscitait la maladie. Il y a vraiment eu de grands Pour les médecins, je ne suis qu’un toxico qui a le sida. changements et des progrès importants sur le plan médical, notamment grâce au travail des associations. Il n’empêche que l’on sent partout la discrimination, J’ai subi récemment une intervention en urologie. Le médecin m’a encore aujourd’hui, sur le plan administratif, annoncé qu’on allait m’opérer en dernier lieu, à la fin de la journée. sur le plan des soins et dans la vie quotidienne. Quand je lui ai demandé pourquoi, il a eu beaucoup de mal à m’expliquer. Il m’a dit qu’un règlement interne à l’hôpital précisait Je ne sais pas moi-même comment j’ai été contaminé mais j’ai qu’on opérait en dernier lieu ce qui était le plus sale et le plus consommé de la drogue dans le passé. J’ai arrêté il y a quinze ans risqué. Pourtant, les modes de désinfection devraient être les mais encore récemment, juste avant une intervention chirurgicale, mêmes pour tout le monde, et le virus du sida est bien moins j’ai entendu l’un des médecins demander à l’autre “Quelle résistant que d’autres. En plus, mon système immunitaire est pathologie ?” ; l’autre médecin a répondu, d’un ton que je à zéro, et je risque beaucoup plus de choper une infection que n’oublierai jamais, “HIV – toxico”. Je traîne cette étiquette depuis d’autres patients séronégatifs.

principales sources > Loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient > Code de déontologie médicale

VIH ET DROITS

11

4

 L e travail, © Alain Kazinierakis

c’est la santé... Qu’est-ce qu’un employeur peut exiger ou pas d’une personne séropositive ou malade du sida ? Il y a le moment délicat de l’embauche, puis les relations de travail au quotidien, ou la visite chez le médecin du travail. L’employeur peut-il exiger de savoir ? Peut-on mentir s’il pose des questions trop directes ? Et s’il sait déjà ? Un employeur peut-il me demander de faire un test de dépistage VIH ? Non. Selon la loi du 28

Bon à savoir

H

La loi du 28 janvier 2003 est très claire, mais pas toujours respectée. Certains employeurs ne sont pas soumis à la législation belge du travail ; on pense aux institutions internationales comme la Commission Européenne. Mais on nous a aussi rapporté des abus dans le chef d’employeurs publics ou privés soumis à la loi belge. Restez attentif à toute demande de prélèvement de sang, même si un test VIH n’est pas annoncé.

(1) Voir la loi du 3 juillet 1978 sur les contrats de travail. (2) Voir à ce propos : Cons. Nat. de l’Ordre, Maladies transmissibles – Secret professionnel – Service 100 – Sida, Rev. Dr. Santé, 2001-2002, p. 59 et s. Interventions invasives : l’Ordre ne donne pas de définition mais on peut donner l’exemple d’une opération chirurgicale.

12

VIH ET DROITS

janvier 2003 relative aux examens médicaux dans le cadre des relations de travail, les tests de dépistage VIH ainsi que les examens génétiques prévisionnels sont explicitement interdits à l’embauche et dans les relations de travail (art. 3). Cette interdiction s’applique aux travailleurs sous contrat de travail1, aux travailleurs sous statut (secteur public) et aux candidats travailleurs à des postes contractuels ou statutaires. Seul un Arrêté Royal délibéré en Conseil des Ministres pourrait prévoir des exceptions à cette interdiction (art. 5). Or, à ce jour, aucun Arrêté Royal n’a été pris en ce sens. Donc, aujourd’hui, aucun employeur public ou privé ne peut pratiquer de test de dépistage VIH lors des examens médicaux à l’embauche ou faire pratiquer ce test dans le cadre de la médecine du travail, même si il a obtenu le consentement du candidat.

Un employeur peut-il, lorsqu’il en a connaissance, invoquer ma séropositivité pour me refuser un emploi ou pour me licencier du poste que j’occupe ? La loi antidiscrimination du 10 mai 2007 répond à cette question. La réponse sera différente selon qu’il s’agit

d’une personne séropositive ou d’une personne malade du sida. Premier cas : il s’agit d’une personne séropositive > Un employeur qui refuse d’engager ou qui licencie un travailleur en raison de sa séropositivité traite cette personne de manière moins favorable qu’une autre personne en raison de son état de santé futur. Ce type de différence de traitement ne peut être admis que si l’employeur dispose d’une justification objective et raisonnable. La question se pose évidemment pour certaines professions médicales, dont l’exercice peut mettre en cause la santé d’un tiers. En ce qui concerne plus particulièrement la pratique médicale, la loi a limité l’abstention quant aux soins à prodiguer par un membre du corps médical atteint par le VIH aux seules interventions invasives2. Le refus pur et simple d’embauche, même en ce qui concerne le personnel soignant, sera par conséquent très souvent disproportionné et discriminatoire au sens de la loi antidiscrimination. Une appréciation au cas par cas devra bien sûr être posée. La situation d’un(e) gynécologue, d’un(e) dentiste ou d’un(e) chirurgien(ne), d’un(e) infirmier(ère) devra être appréciée plus strictement que celle d’autres membres du corps médical qui ne sont pas appelés quotidiennement à pratiquer des actes médicaux invasifs (aide soignante, par exemple). Par ailleurs, la possibilité réelle d’adopter des mesures de protection particulières devra également être prise en compte.

Donc, si dans certains cas, le refus d’embauche ou le licenciement peut être justifié lorsque la santé d’un tiers est mise en danger, il faudra toujours que la mesure prise à l’encontre de la personne séropositive soit proportionnée (mesures de précautions impossibles à mettre en œuvre, activité médicale essentiellement invasive...).

recruteur apprenne sa maladie. Si le candidat est physiquement apte à l’emploi et possède les qualifications requises, sa maladie ne peut en aucun cas constituer un obstacle à son engagement pour cette fonction. De la même manière, si le travailleur est déjà en fonction au moment où il tombe malade, il ne peut être licencié sur cette base.

En revanche, l’argument qui consiste à mettre en avant la protection du travailleur atteint du VIH lui-même pour lui refuser l’accès à un emploi ne semble pas pouvoir être considéré comme une justification objective et raisonnable à la différence de traitement pratiquée.

Si l’employeur a des doutes sur l’aptitude à l’emploi de son travailleur, c’est-à-dire, sur sa capacité physique à accomplir les fonctions afférentes au poste de travail en question, il reviendra alors au médecin du travail de l’examiner et, le cas échéant, de délivrer un certificat d’inaptitude partielle ou totale pour la fonction exercée. Dans ce dernier cas, le médecin du travail formule des réserves quant aux tâches que le travailleur pourra accomplir compte tenu de son état de santé.

Dans un avis rendu sur cette question, certains membres du Comité consultatif de bioéthique de Belgique insistent sur le fait que cette approche implique un risque de glissement vers une médecine du travail sélective, axée sur l’élimination systématique des travailleurs potentiellement moins productifs. Cette approche purement économique de la médecine du travail reposant sur l’exclusion et l’élimination via la surveillance médicale des travailleurs qui présentent une susceptibilité à la maladie, entre en contradiction avec la réglementation actuelle belge de la médecine du travail qui privilégie une médecine du travail protectrice visant à adapter les emplois aux travailleurs et à limiter les risques inhérents à une fonction en améliorant l’environnement de travail3. Deuxième cas : il s’agit d’une personne malade du sida > Un employeur qui refuse d’engager ou qui licencie un travailleur malade du sida traite cette personne de manière moins favorable qu’une autre personne en raison de son handicap. Au sens de la loi, la notion de handicap doit être interprétée très largement : on ne se limitera pas aux personnes affectées d’une déficience au plan moteur ou sensoriel, mais on prendra en compte également les personnes affectées d’une maladie ou d’une infirmité pouvant modifier leur capacité professionnelle. Le concept de handicap vise donc également les maladies chroniques, parmi lesquelles le sida peut être compté. Ce type de différence de traitement ne peut être admis que si l’employeur peut invoquer l’existence d’une exigence professionnelle essentielle et déterminante en raison de la nature de l’activité et des conditions de son exercice. En d’autres termes, il ne pourra justifier le refus d’embauche ou le licenciement d’un travailleur malade du sida que si le fait de ne pas être malade du sida est indispensable pour pouvoir faire le travail requis. À titre d’exemple, on prendra le cas d’une personne malade du sida qui postule à un emploi de magasinier dans une grande surface. Imaginons que le

G

Bon à savoir

La notion de handicap dans la cadre de la loi antidiscrimination du 10 mai 2007 doit être comprise au sens large. Ceci n’a rien à voir avec une reconnaissance d’un taux d’invalidité selon un barème comme c’est le cas lorsqu’on sollicite des allocations pour personnes handicapées.

En outre, pour les travailleurs et les candidats travailleurs avec un handicap, l’employeur est tenu de prévoir des aménagements raisonnables. Ce sont des mesures concrètes qui vont compenser l’influence négative d’un milieu de travail inadapté pour une personne handicapée physique, sensorielle ou mentale. L’employeur va devoir remplir cette obligation de fournir des aménagements raisonnables aussi bien pour les personnes avec un handicap au moment de l’embauche que pour celles qui deviennent handicapées en cours de carrière (par exemple, suite à une maladie qui affecterait leurs capacités). Pour les personnes malades du sida, on pourrait envisager l’adoption d’un horaire adapté pour leur permettre de se rendre aux consultations médicales ou l’aménagement de temps de pause plus fréquents ou encore la limitation de leurs déplacements afin de réduire la fatigue qu’ils engendrent. Pour évaluer le caractère raisonnable de l’aménagement, on réfléchira au cas par cas, en fonction notamment de la capacité financière de l’employeur, du coût financier de l’aménagement et de ses effets directs et indirects pour un plus grand groupe de travailleurs ou pour des visiteurs externes. Des aides spécifiques sont également prévues pour les aménagements des postes de travail, par exemple. Évidemment, l’employeur est libre de refuser d’engager une personne qui, en raison de son handicap, ne répond pas aux exigences de fonction essentielles ou qui ne peut effectuer les tâches principales définies, même avec des aménagements raisonnables. Il y alors un constat d’inaptitude au travail.

(3) Comité consultatif de bioéthique de Belgique, Avis n° 20 du 18 novembre 2002 relatif aux tests génétiques prédictifs et aux tests HIV dans le cadre des relations de travail.

VIH ET DROITS

13

Est-ce que je peux cacher ou mentir sur mon état de santé à mon employeur ? La loi antidiscrimination n’aborde pas cette problématique. C’est dans la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l’égard du traitement de données à caractère personnel et dans la Convention Collective de Travail n° 384 qu’il faut chercher la réponse. En effet, selon ces textes, les données relatives à la santé des travailleurs relèvent de leur vie privée et ne peuvent être collectées que par le médecin du travail, dans l’intérêt du travailleur et moyennant son consentement. Plus spécifiquement, la CCT n° 38 interdit “les distinctions sur base d’éléments personnels lorsque ceux-ci ne présentent aucun rapport avec la fonction ou la nature de l’entreprise sauf si des dispositions légales autorisent ou contraignent l’employeur (...)”. Par ailleurs, toujours selon le texte de cette CCT, “la vie privée des candidats doit être respectée lors de la procédure de sélection. Cela implique que des questions sur la vie privée ne sont pertinentes que si elles se justifient en raison de la nature et des conditions d’exercice de la fonction”. Enfin, en vertu de la loi du 8 décembre 1992, un employeur n’est en principe jamais autorisé à collecter ni traiter des données relatives à la santé d’un candidat à l’embauche ou d’un travailleur, même si ce dernier a donné son consentement à ce traitement.

(4) La CCT n°38 a été négociée entre les employeurs et les partenaires sociaux et certains des ses articles ont acquis force de loi.

Il en découle donc que l’employeur ne peut poser de questions relatives à la santé du travailleur dans le cadre de l’entretien d’embauche, mais aussi que le candidat peut se taire ou même cacher ses problèmes de santé lorsque cet état de santé est sans rapport avec la fonction à pourvoir.

Dans un jugement du 30 novembre 2006, le Tribunal du Travail de Bruxelles a en effet rappelé que : “Si le travailleur a l’obligation de prendre soin de sa sécurité et de celle des autres personnes concernées du fait de ses actes et omissions au travail et de signaler immédiatement à l’employeur toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et immédiat pour sa santé, il n’en demeure pas moins qu’un travailleur n’a aucune obligation d’informer son futur employeur d’une maladie ou handicap dont il est atteint car ces éléments relèvent du droit au respect de sa vie privée sauf si l’exercice de la fonction risque de porter atteinte à la sécurité du travailleur, de ses collègues ou de tiers. Il appartient au médecin désigné par l’employeur, dans le respect du secret professionnel, d’indiquer à l’employeur s’il estime le travailleur apte à remplir la fonction concernée”. Enfin, il faut noter que l’employeur belge qui viole la CCT n° 38 ou la loi du 8 décembre 1992 s’expose à des sanctions pénales.

La loi interdit-elle aux prostituées d’exercer leurs activités ? Non. Pour rappel, l’activité de prostitution en Belgique est tolérée, mais il n’existe aucune législation du travail en la matière. Seuls existent, au niveau pénal, le délit de racolage, le proxénétisme, la tenue de maison de débauche et l’incitation à la débauche. La gestion de la prostitution est d’ordre communal. Comme il n’y a pas de reconnaissance professionnelle de l’activité, une personne prostituée séropositive ou non est dans situation de précarisation socioprofessionnelle. Ceci étant, la personne prostituée peut s’inscrire comme indépendante, dans une rubrique professionnelle qui ne demande pas d’accès à la profession comme : “serveuse, hôtesse, sexologue, strip-teaseuse, danseuse...” Ces professions peuvent être utilisées par les travailleurs du sexe pour obtenir un statut de travailleur indépendant. Lors d’un contrôle de police, la personne prostituée n’est pas dans l’obligation de parler et de préciser son état de santé. Le policier n’est pas mandaté pour recevoir ce genre d’information et n’est pas en droit de l’exiger. La personne prostituée séropositive bénéficie des mêmes droits de discrétion quant à son état de santé que tout citoyen. w w w. pr eventions ida. org

principales sources > L oi du 28 janvier 2003 relative aux examens médicaux dans le cadre des relations de travail. > Loi antidiscrimination du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination, M.B. 30/05/2007 > C onvention Collective de Travail n° 38. > Code déontologie médicale, Titre II, Chapitre V, le secret professionnel du médecin. 14

VIH ET DROITS

> Loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée à l’égard des traitements de données à caractère personnel.

H Témoignage Céline, 35 ans Je suis africaine. Il y a deux ans, je vivais en France et j’ai fait la connaissance d’un Belge. Je suis venue en Belgique pour me marier avec lui. Je vivais chez lui quand je suis tombée très J’ai fait une demande au CPAS pour avoir une aide, mais cette aide malade. On m’a emmenée à l’hôpital où j’ai fait des examens. Le m’a été refusée. J’ai alors dû faire un procès et le tribunal a décidé médecin m’a dit que j’étais séropositive; je n’ai pas tout de suite que vu mon état de santé le CPAS devait m’accorder une aide. compris ce que ça voulait dire. Quand j’ai entendu le mot ‘sida’, j’ai enfin compris. Ca s’est passé cinq jours avant le mariage et les bans étaient publiés. J’aimais mon fiancé et je pensais qu’il m’aimait aussi et qu’il m’accepterait telle Maintenant je vis dans un home. C’est mieux que que j’étais. Je lui ai annoncé que j’étais séropositive. l’hôpital mais je ne m’y sens pas chez moi. Il m’a abandonnée. Je me suis retrouvée à Bruxelles, seule, sans argent, sans connaître personne. Après l’hôpital, j’ai séjourné dans un centre pour illégaux tenu par des religieuses. J’y suis restée un peu puis les sœurs m’ont mise à la porte parce que je partageais des fruits avec des enfants et elles craignaient que je les contamine. Nous étions à la veille d’un long week-end et j’ai dormi à la gare du Midi. Avec l’aide de plusieurs assistantes sociales, j’ai commencé à faire des démarches pour être régularisée. J’ai fait une chute tellement j’étais fatiguée et j’ai de nouveau été hospitalisée. Comme je n’avais nulle part où aller, on m’a gardée plus de trois mois à l’hôpital. Pour moi, ça revenait à être en prison. Je ne l’ai pas supporté et je me suis enfuie.

Maintenant je vis dans un home. C’est mieux que l’hôpital mais je ne m’y sens pas chez moi. Les horaires ne sont pas adaptés à mes traitements. La nourriture n’est pas adaptée à ma santé, encore moins à ma culture. Je voudrais trouver un logement à moi, mais je n’ai même pas la force de visiter des appartements et de faire des démarches. Quand je repense à ce que j’ai vécu, je me trouve courageuse d’avoir tenu le coup. J’étais venue en Belgique pour épouser l’homme que j’aimais. Je venais y chercher le bonheur. J’ai eu tout le contraire.

VIH ET DROITS

15

5

  Sida et sécurité sociale Dans l’organisation du système de sécurité sociale belge, il faut faire une distinction entre trois régimes : travailleurs salariés, indépendants et le régime des fonctionnaires. © Alain Kazinierakis

Chaque régime a ses particularités. pour ceux que ne sont assujettis à aucun de ces trois régimes, il existe aussi les aides résiduaires, comme l’allocation aux personnes handicapées et l’aide sociale/CPAS 1. Le sida et le droit au chômage Le droit au chômage ne concerne que les personnes relevant du régime des travailleurs salariés. Le travailleur qui abandonne son emploi pour raisons médicales et qui introduit une demande d’allocations de chômage (s’il n’est pas, à ce moment, indemnisé par son organisme assureur en matière de soins de santé), estime donc qu’il présente, de manière générale, une aptitude au travail. Il devra alors clarifier le motif de son abandon au Bureau régional de l’emploi. Le travailleur pourra solliciter un examen médical, et le médecin agrée par le bureau de l’ONEM examinera son aptitude générale au marché de l’emploi. La réduction de sa capacité physique et les contre-indications médicales seront prises en compte pour apprécier l’abandon d’emploi.

Bon à savoir

H

Les personnes travaillant grâce aux titres-service sont assujetties au régime des travailleurs salariés.

(1) Centre Public d’Aide Sociale. Voir le chapitre CPAS et VIH. (2) Office nationale de l’emploi (3) Institut National de Maladie Invalidité

16

VIH ET DROITS

Pour le chômeur complet indemnisé, l’examen médical de l’aptitude générale au marché de l’emploi intervient dans le cadre de l’activation du comportement de recherche d’emploi. Une inaptitude atteignant au moins 33 % a pour effet de dispenser le chômeur de l’application de cette procédure, de manière temporaire ou définitive. En résumé, le droit au chômage dépendra de l’appréciation du médecin conseil de l’ONEM2.

L’assurance maladieinvalidité intervient-elle différemment en matière de sida ? Non. Quelque soit le régime dont il dépend, un assuré social séropositif bénéficie des mêmes protections que tout assuré. Aucune

distinction n’est faite selon la maladie, que ce soit pour le remboursement des traitements et des soins, l’incapacité de travail ou l’invalidité. En cas de maladie, le bénéficiaire se verra non seulement remboursé de ses frais médicaux, mais en plus, s’il travaillait (ou assimilé), il aura également droit à des prestations destinées à compenser la perte de rémunération. Pour pouvoir bénéficier de ces prestations, l’assuré doit satisfaire à plusieurs conditions. Entre autres, voir sa “capacité de gain” être réduite d’au moins 66 % par rapport à sa profession habituelle. Ces régimes ne s’appliquent qu’à des maladies et des accidents qui ont lieu dans la vie privée. De manière générale, la couverture de l’INAMI3 est plus favorable que l’assurance chômage.

Le travailleur indépendant est-il couvert face au coût des traitements ? Oui. Depuis janvier 2005, les médicaments antirétroviaux sont remboursables à tous les indépendants dans le cadre de l’assurance obligatoire soins de santé. Ils doivent être acceptés dans le régime du tiers payant sur base d’un accord de remboursement délivré par le médecin conseil de la mutuelle. De plus, à partir du 1er janvier 2008, les petits risques seront aussi compris dans l’assurance obligatoire des travailleurs indépendants, ce qui résout le problème du remboursement des autres traitements.

Cela dépend du “taux d’invalidité”, et non du statut sérologique, si vous êtes sans autre revenu. Il existe plusieurs types d’allocations aux personnes handicapées. L’allocation de remplacement de revenus est accordée à une personne qui, suite à son handicap, voit sa capacité de gain réduite de deux tiers (66 %) au moins par rapport à ce qu’une personne valide est en mesure de gagner sur le marché du travail. L’allocation d’intégration, elle, sert à supporter des frais supplémentaires, (par exemple la construction d’une rampe d’accès) que doit exposer une personne handicapée pour s’intégrer dans la vie sociale. Par ailleurs, sur base d’une reconnaissance médicale du handicap, il est possible de bénéficier de divers avantages sociaux et fiscaux, indépendamment de l’allocation pour personne handicapée.

Le personnel médical est-il assuré en cas de contamination accidentelle ? Oui, le personnel salarié est protégé par la législation sur les accidents du travail s’il est contaminé de manière accidentelle. Par exemple, une infirmière qui se pique avec une aiguille contaminée subit un accident du travail. Dans ce cadre, les médications prophylactiques post-accident du travail sont normalement prises en charge par l’assurance de l’employeur.

H

Ai-je droit aux allocations pour personne handicapée ?

Pour en savoir plus

Contactez l’assistante sociale d’un Centre de référence sida Contactez les services sociaux de votre mutuelle www.socialsecurity.fgov.be

Par contre, les travailleurs indépendants doivent, en cas d’accident, assurer financièrement ce traitement eux-mêmes. w w w. pr eventions ida. org

remarque La notion de handicap est ici fonction d’un taux d’invalidité particulier qui donne accès à des avantages ou des allocations adaptés. Il ne faut pas la confondre avec la notion de handicap, plus générale, de la nouvelle loi antidiscrimination (voir aussi chapitre 1).

Patrick, 32 ans Je suis tombé malade il y a cinq ans. Je n’étais pas en ordre pour avoir droit au chômage et j’ai dû faire des démarches pour avoir un statut d’handicapé et avoir un minimum de revenus. J’ai subi des traitements lourds avec de la chimiothérapie, ce qui avait un impact sur mon apparence. Lors de mes démarches, au CPAS par exemple, je sentais que le regard qu’on posait sur moi était quelque peu désapprobateur. J’ai eu l’occasion de postuler pour une place dans l’enseignement. J’avais vraiment besoin de ce travail pour redonner un minimum de structure et de sens à ma vie.

© Alain Kazinierakis

H Témoignage refuser la place, ou au contraire si je pouvais rester discret par rapport à ça. Finalement, tout s’est bien passé. Le paradoxe, c’est que dans la même semaine, je devais passer une visite pour avoir un statut d’handicapé. Dans un cas, je devais avoir l’air le plus en forme possible pour pouvoir travailler. Dans l’autre cas, je devais avoir l’air au plus mal pour obtenir ma prime, indispensable pour joindre les deux bouts.

Cela impliquait que je passe une visite médicale. J’étais très partagé et assez angoissé par cette visite, ne sachant pas très bien si je devais parler de ma séropositivité, au risque de me voir

VIH ET DROITS

17

 E nfance, adolescence et VIH © “One Vision” 2007/Bristol-Myers Squibb - JavierSalvador

6

Bien que la transmission mère - enfant du virus soit devenue rare en Belgique, des mineurs vivent aussi avec le VIH. Certains depuis leur naissance, d’autres sont touchés plus tard. Ce sont des parcours fort différents, mais tous entrent dans la vie d’adulte avec un lourd secret à gérer.

> Enfance et VIH Quels sont les droits de l’enfant séropositif à l’école ? Les enfants séropositifs doivent être traités rigoureusement de la même façon que les autres enfants. Dans une circulaire adressée à l’ensemble de la communauté éducative, les autorités de la Communauté française ont souligné qu’il “ne peut être question de refuser l’inscription d’un élève ou d’exclure un élève ou un membre du personnel scolaire sur base de sa séropositivité” car “leur rejet ne repose sur aucun fondement scientifique.” L’Office de la naissance et de l’enfance (ONE) a adopté une attitude similaire en ce qui concerne l’accueil de la petite enfance : “Les enfants touchés ont le droit de faire usage sans restriction des possibilités d’encadrement et d’éducation offertes à la collectivité, indépendamment de leur éventuelle maladie, dans la mesure où leur état le leur permet.”

Doit-on prendre des mesures spécifiques dans les crèches et les écoles à l’égard des enfants séropositifs ? Non. Aussi bien les responsables de l’enseignement en Communauté française que ceux de l’ONE insistent sur le fait qu’il ne faut pas prendre de mesures particulières à l’égard des enfants séropositifs. Dans le cadre des rapports quotidiens, il n’existe en effet aucun risque que des enfants infectés ou malades transmettent le VIH à d’autres enfants ou aux 18

VIH ET DROITS

personnes qui s’occupent d’eux. Dans leur circulaire, les autorités de la Communauté française rappellent que “les connaissances des modes de transmission du virus du sida nous permettent d’affirmer que, pour protéger efficacement la communauté scolaire, il est vain de savoir s’il y a ou non des personnes séropositives dans l’école, et surtout inutile de chercher à les identifier.” “Sont suffisantes et efficaces les mesures d’hygiène prises vis-à-vis de tous, sans exception. Ces mesures d’hygiène, dites universelles, sont plus utiles encore pour éviter la transmission d’autres infections plus fréquentes et surtout plus contagieuses que le sida.”

Les parents doivent-ils prévenir l’école ou la crèche de la séropositivité de leur enfant ? Même si les écoles ou les crèches demandent souvent des informations écrites ou orales sur l’état de santé de l’enfant lors de l’admission, les parents n’ont aucune obligation d’information vis-à-vis des responsables de crèche ou d’école en ce qui concerne le VIH. Divulguer la séropositivité d’un enfant peut provoquer des réactions d’exclusion et de rejet contre lesquelles un enfant est sans défense. Par contre, si l’équipe vient à apprendre, par une fuite d’information, la contamination de l’enfant, il peut y avoir des réactions très négatives, car tous les professionnels de l’enfance ne sont pas préparés à l’accueil d’un enfant séropositif. Il est parfois judicieux de mettre une personne de confiance au courant dans l’institution, surtout si l’enfant doit prendre des médicaments pendant les heures

Les enseignants sont-ils tenus par le secret professionnel ? Oui. Le Service juridique de la Communauté française et celui de la Direction générale de l’enseignement obligatoire ont confirmé qu’un enseignant, un éducateur d’école ou d’internat et un chef d’établissement peuvent être au regard de l’article 458 du Code Pénal assimilés “à des personnes dépositaires par état ou par profession des secrets qu’on leur confie.” Le principe de l’article 458 du Code pénal doit donc bien être compris comme une obligation de se taire, assortie de sanctions pénales si le dépositaire du secret ne la respecte pas. Malheureusement, il arrive encore trop fréquemment que les professionnels de l’encadrement scolaire ne soient pas conscients de la portée cette obligation.

> Être jeune et séropositif Le droit de prendre soin de sa santé seul ! La loi sur le droit des patients a prévu que le mineur pourrait, suivant son âge et sa maturité, être amené à exercer de manière autonome ses droits si le médecin estime que le jeune patient en est capable.

Quand dois-je prendre ma propre mutuelle ? Être en ordre de mutuelle est indispensable pour pouvoir être remboursé des soins de santé ou en cas de maladie et invalidité. Voici les situations principales où il est nécessaire de s’inscrire soi-même auprès d’une mutuelle :

H

scolaires ou en voyage scolaire et qu’il n’arrive pas à les prendre seul. La décision de transmettre ou non l’information revient aux parents, qui peuvent utilement discuter du pour et du contre de leur décision avec le médecin de l’enfant et le service social des Centres de référence par exemple.

Pour en savoir plus

Lire : Circulaire ministérielle relative à l’accueil des enfants infectés par le VIH dans les institutions dépendant de la Communauté française (1er décembre 2002) Sur le site www.enseignement.be > Système scolaire > publications téléchargeables : > Le secret professionnel et les enseignants, piste de gestion, AGERS (2007) ; > Le secret professionnel et les centres psycho-médico-sociaux, AGERS (2007) ; > Le livre blanc : accueil de l’enfant malade chronique ou handicapé à l’école (en réédition).

> dès l’entrée dans la vie professionnelle ; > dès l’ouverture du droit à une indemnité de chômage ; > dès que l’on habite seul et qu’en plus, on est domicilié comme “isolé” ; > dans tous les cas, dès l’âge de 25 ans.

Q u e s t ions posé e s à L A C ommission de la protection de la vie priv é e : 1) Dans les cadres scolaires et extrascolaires, y a-t-il une personne habilitée à recevoir toute information relative à la santé des enfants participants aux activités ? “La communication de données relatives à la santé ne peut être réalisée que sous la responsabilité d’un professionnel des soins de santé.” (Art. 7, §4 loi vie privée du 08/12/1992) 2) D  ans le cas où une personne serait habilitée à recevoir toute information relative à la santé des enfants participants aux activités, de quelles natures doivent être celles-ci ? “(...) La communication de données relatives à la santé des enfants demandée par les organismes concernés (écoles, crèche, club sportif, etc.), doit toujours être limitée à ce qui est strictement nécessaire. A titre d’exemple, (...) si la finalité est d’administrer à l’enfant un traitement médical qu’il ne peut prendre seul, seul le traitement doit être mentionné, avec ses modalités. Le diagnostic est superflu. De même, si des précautions particulières doivent être prises à l’égard de l’enfant séropositif, il convient de les demander, sans qu’il soit justifié d’en demander la cause.” 3) Les parents peuvent-ils ne rien dire ? “Si la demande de données personnelles relatives à l’enfant est disproportionnée, soit parce que les données demandées sont superflues, soit parce qu’elles sont d’une précision excessive, cette demande de renseignements est illégale car elle est en contradiction avec l’article 4 de la loi vie privée. A ce titre, les parents peuvent refuser de répondre.” Rappelons aussi. La loi “vie privée” du 8 décembre 1992 s’applique de la même manière aux mineurs d’âge qu’aux personnes adultes. Dès que l’enfant atteint l’âge de discernement, il exercera son droit à la vie privée en concertation avec ses parents (ou tuteurs). L’âge de discernement est estimé en fonction de l’âge réel de l’enfant, mais surtout de sa maturité. Lire la réponse complète de la CPVP sur notre site : www.preventionsida.org VIH ET DROITS

19

G

EN pratique

Toutes ces questions sont assez complexes, demandez conseil à un(e) assistant(e) social(e) du Centre de référence sida où vous êtes suivi(e).

Pour en savoir plus

H

www.inforjeunes.be et téléphone universel (tarif local) : 070/ 233 444 ; www.sdj.be : le site des Services Droits des Jeunes ; www.masecu.be : site d’informations vulgarisées sur la sécurité sociale.

(1) Voir dans adresses utiles ; SPF Sécurité sociale Direction générale Personnes handicapées. (2) Interventions pendant lesquelles les saignements du patient peuvent être importants.

Puis-je toucher des allocations familiales moi-même en tant qu’“isolé” ? Oui, dès sa majorité (18 ans ou émancipé), un jeune qui a moins de 25 ans et qui est étudiant de plein exercice peut toucher des allocations familiales. En tant que personne vivant avec une maladie chronique, il faut vérifier s’il a un droit à des allocations majorées1.

Un job étudiant ?

Un “job” ou contrat d’étudiant répond aux mêmes règles que les contrats de travail en général. L’employeur ne peut pas demander de faire un test de dépistage ou poser des questions indiscrètes sur l’état de santé (Voir Le travail c’est la santé).

Existe-t-il des métiers que je ne pourrai pas exercer ? Il y a deux aspects à cette question : “y a-t-il des métiers qu’on ne peut pas exercer sans mettre sa santé en danger ?” et “y a-t-il des métiers où on risque de mettre en danger la santé des autres ?”

Pour la première question, il faut en discuter avec son médecin spécialiste. Pour la deuxième question, il n’existe pas de tels métiers. Compte tenu des données actuelles de la science, hormis les situations rares où il existe un risque évident de blessure, les contacts physiques habituels d’une vie familiale, sociale, scolaire ou professionnelle ne présentent pas de risque de transmission. L’Ordre des médecins demande cependant : “dans l’intérêt du patient, et même si les risques de contamination sont infimes, il est vivement recommandé à tout médecin ou infirmier se sachant atteint de s’abstenir de participer à des interventions invasives2.”

Quand on a des difficultés à démarrer dans la vie ! Comment trouver les moyens de se loger, de se nourrir, de poursuivre ses études quand les parents ou le tuteur ne peuvent aider financièrement et qu’on est sans revenu ? Il possible de s’adresser au CPAS. Celui-ci peut aider les jeunes à trouver un emploi ou lui verser un revenu d’intégration pour lui permettre de suivre des études (voir CPAS et VIH). w w w. pr eventions ida. org

H Témoignage Aalyah, 21 ans Je me suis regardée dans le miroir et j’ai constaté que j’étais comme tout le monde. J’avais juste un secret bien gardé. Être une personne ou plutôt une adolescente séropositive n’est pas une chose facile. Comme beaucoup, je me suis demandée : pourquoi moi ? C’était de trop. Non seulement je suis orpheline mais, en plus, il fallait que j’aie le virus en moi. J’en ai mis et j’en ai pris du temps avant de me dire que ce virus était à l’intérieur et non à l’extérieur, que personne – mis à part l’équipe médicale et quelques membres de ma famille –, ne serait au courant. Je me suis regardée dans le miroir et j’ai constaté que j’étais comme tout le monde. J’avais juste un secret bien gardé. Nous, les ados, ne sommes pas différents des autres. Nous avons un cœur, des bras, des jambes. Nous sommes capables de travailler, d’aimer et d’être aimés. J’espère juste un jour trouver un homme sur les millions sur la planète, qui pourra m’aimer comme je suis. 20

VIH ET DROITS

En ce qui concerne les médicaments, j’en prends cinq. Je sais qu’il existe des ados séropositifs qui en prennent plus, alors je n’ai pas à ma plaindre. Je suis passée par des médicaments au goût amer, mais chaque fois je me suis forcée à les prendre. C’est vrai, non ? Pourquoi ne pas les avaler quand tu sais que leur but est de t’aider ? C’est ce que nous, ados, nous devons nous dire. J’ai des droits en tant que personne ado et séropositive. Et s’il faut que je lutte plus que les autres, je le ferai ! J’ai envie de vivre même si quelque fois, comme beaucoup, j’ai un coup de blues. Je garde toujours en moi une phrase de mère Térésa qui disait : “La vie est un cadeau, alors SAISIS-LA !”

7

 L es migrants face au

© “One Vision” 2007/Bristol-Myers Squibb - Bostica Bruno

VIH-sida : une situation de vulnérabilité La situation juridique et sociale des migrants vivant avec le VIH-sida (non ressortissants de l’Union européenne) est très variable, en fonction de leur statut administratif, de leurs conditions de vie, de leur situation socioéconomique, des barrières culturelles et linguistiques.

Q u e l q u e s poin t s à r e t e nir > Les “sans-papiers”, ou personnes en séjour illégal, ne disposent d’aucune autorisation de séjour, même temporaire. Il s’agit des demandeurs d’asile déboutés, d’ex-étudiants étrangers sans droit au séjour, d’immigrés clandestins... Toutes ces personnes ont accès aux soins grâce à la législation sur l’aide médicale urgente. > Les étrangers en séjour illégal ou temporairement légal peuvent demander une autorisation de séjour sur base de l’article 9 bis (pour raison humanitaire) ou 9 ter (pour raison médicale). > Les étrangers en séjour légal1, eux, ont accès aux soins médicaux. La situation se normalise. Cependant, les aspects culturels et linguistiques peuvent se révéler un frein : la bonne utilisation des structures de santé de notre pays n’est pas si simple.

Ai-je droit à l’aide médicale urgente ? Un arrêté royal du 12 décembre 1996 donne la possibilité aux personnes en situation illégale d’avoir accès aux soins dans le cadre de l’aide médicale urgente. Cette notion d’urgence n’a rien à voir avec le service 100 ; elle est à interpréter dans un sens très large, puisqu’elle couvre aussi les soins ambulatoires (chez le médecin généraliste notamment) et les soins en institutions (en cas d’hospitalisation). Elle peut donc être préventive ou curative.

Les conditions pour pouvoir invoquer l’aide médicale urgente sont les suivantes : 1. La personne doit se trouver en Belgique en séjour illégal. 2. La personne doit être en état de besoin (ce que le CPAS vérifiera lors de son enquête sociale) et ne pas être prise en charge par un tiers2. 3. Un certificat d’aide médicale urgente doit être délivré par un médecin ou un dentiste reconnu par l’INAMI. 4. En principe, les soins pris en charge doivent figurer dans la nomenclature INAMI. Mais la jurisprudence évolue sur ce dernier point, il faut se renseigner auprès d’un service d’aide juridique ou sociale. En général, c’est le CPAS du lieu où la personne sans papiers réside habituellement qui est compétent. Cette aide est exclusivement médicale et ne peut pas être complétée par une aide alimentaire, financière ou au logement. Cela pose un premier problème : étant donné la lourdeur des traitements anti-VIH, il est très difficile de les suivre correctement sans une nourriture adéquate, un logement, etc.

(1) À l’exception des touristes. (2) Quand une prise en charge a été signée, l’État a le droit de se retourner contre le garant pour recouvrer les frais exposés. VIH ET DROITS

21

La loi prévoit en son article 9 ter que l’étranger qui souffre “d’une maladie dans un état tel qu’elle entraîne un risque réel pour sa vie ou son intégrité physique ou un risque réel de traitement inhumain ou dégradant lorsqu’il n’existe aucun traitement adéquat dans son pays d’origine ou dans le pays où il séjourne” peut demander une autorisation de séjour. Cette demande peut être introduite par un étranger en situation illégale (ex : demandeur d’asile débouté, clandestin) ou en situation légale lorsque le droit de séjour (d’un an) arrive à échéance et qu’il faut le renouveler, pourvu qu’il ait des documents d’identité ou qu’il puisse prouver l’impossibilité de s’en procurer.

© Alain Kazinierakis

La bonne procédure ?

Certains médecins et pharmaciens, surtout en première ligne, ne sont pas toujours bien informés et hésitent à qualifier un soin d’“urgent”. Dès lors, il peut être intéressant d’aller chez un des médecins désignés par le CPAS qui prend en charge l’aide médicale urgente. En effet, la plupart des CPAS concluent des conventions d’aide médical urgente avec divers prestataires de soins (médecins, dentistes...) et des hôpitaux. Il est possible qu’un patient en séjour illégal soit déjà suivi par un spécialiste VIH qui n’a pas de convention avec le CPAS du patient mais que celui-ci préfère continuer avec son médecin. Dans ce cas, la jurisprudence oblige le CPAS à donner son accord pour le médecin du patient si celui-ci n’est pas plus cher (Voir aussi CPAS et VIH). Finalement, l’arrêté royal du 12 décembre 1996 précise que le CPAS doit respecter le caractère confidentiel de l’aide médicale. Les informations recueillies à l’occasion de l’enquête sociale ne sont transmises ni à la police, ni à l’Office des étrangers.

(3) Sur ce point, lire le dépliant : “Séjour pour raisons médicales” publié en plusieurs langues par Medimmigrant asbl.

22

VIH ET DROITS

Pour l’Office des étrangers (OE), les éléments déjà invoqués lors d’une première procédure qui a échoué deviennent irrecevables lors d’une deuxième demande. L’OE cherche à limiter l’introduction successive de demandes identiques ; il faut donc veiller à pouvoir présenter des éléments nouveaux. Les éléments appropriés ? Parmi les documents et les informations à fournir, il y a un certificat médical détaillé (voir : conseil pratique) et le demandeur doit donner à l’OE tous les renseignements utiles liés à sa maladie. Le risque, ou l’absence de risque, en cas de retour au pays d’origine doit toutefois être prouvé par le médecin fonctionnaire de l’Office des étrangers. Dans le cas du sida, il faudra prouver que le traitement nécessaire n’est pas disponible dans le pays d’origine. Ce point est délicat. L’accessibilité des traitements antirétroviraux s’améliore chaque année dans de nombreux pays en voie de développement, et on ne peut que s’en réjouir pour les millions de personnes vivant avec le VIH dans les pays à faible revenu. Mais il faut éviter que ce progrès se retourne contre les candidats réfugiés originaires de ces mêmes pays.

Puis-je obtenir une autorisation de séjour sur base médicale ? Il convient d’engager

Deux avis médicaux vont être confrontés : celui du médecin spécialiste VIH et celui du médecin conseil de l’Office des étrangers. D’abord, au sujet de la gravité du cas et pour décider du meilleur traitement à suivre. Ensuite, sur ce qu’on entend par l’accès adéquat à ce traitement dans le pays d’origine. Là, il importe de rassembler toutes les informations utiles et de bien citer les sources.

la bonne procédure en soumettant les éléments appropriés !3 La nouvelle loi sur l’accès au territoire belge est entrée en vigueur le 1er juin 2007. L’ancien article 9.3 a été remplacé par les articles 9 bis et 9 ter. Ce dernier permet explicitement de demander une autorisation de séjour pour raison médicale.

Plusieurs associations ont regroupé leurs informations et leurs efforts pour faciliter le travail des médecins spécialistes VIH, des avocats et des assistants sociaux qui accompagnent un patient demandeur d’asile dans le dédale des procédures.

L’autorisation de séjour qui est délivrée en cas de réponse positive est valable un an. Chaque année, il faudra renouveler la demande d’autorisation en prenant en compte l’évolution de la maladie et l’accessibilité des traitements dans le pays d’origine. Néanmoins, après une période de 5 ans, le demandeur recevra une autorisation pour un délai indéterminé.

Puis-je demander un report d’exécution de l’ordre de quitter le territoire pour des raisons médicales ? Pour les demandeurs d’asile déboutés qui arrivent en fin de procédure, ou pour les étrangers qui arrivent à la fin d’un visa temporaire qui ne pourra pas être prolongé (exemple, un ancien étudiant), il est possible de demander, à titre exceptionnel, un délai dans l’exécution de leur ordre de quitter le pays, sur base médicale. Il faut présenter un certificat médical attestant que le patient n’est pas en état de voyager ou que les traitements dont il a besoin ne sont pas accessibles dans son pays d’origine (voir conseil pratique). La procédure est cependant aléatoire, et, en cas de succès, aboutit à un report de trois mois maximum.

Les étudiants étrangers arrivés en Belgique ont-ils un accès normal aux soins ?

VIH/sida, qu’elles soient belges ou non, sont victimes de certaines discriminations. Pour les migrants s’ajoutent les soupçons du fait qu’ils proviennent de pays considérés comme hautement endémiques. Il en découle un surdépistage et une augmentation de la stigmatisation. Une autre barrière importante est culturelle, quel que soit leur statut légal. Le système de santé belge est complexe. Certaines personnes peuvent avoir des difficultés à comprendre les traitements qu’on leur prescrit. Il manque encore beaucoup de médiateurs interculturels dans les hôpitaux, même si quelques expériences intéressantes ont été entreprises ces dernières années. À cela s’ajoute le fait qu’ils adhèrent difficilement aux programmes de prévention et qu’ils se retrouvent eux-mêmes fort isolés dans leur propre communauté, en raison des préjugés. Globalement, on peut considérer que les nombreuses difficultés administratives ou sociales auxquelles beaucoup de migrants se heurtent, faute d’un bon système d’accueil et d’un cadre légal clair, favorisent l’isolement et la peur. Cela peut entraîner dans certains cas des comportements antipréventifs.

G

Contacts utiles

Medimmigrant asbl Soutien aux (accompagnateurs des) personnes en séjour illégal (“les sans papiers”) ou avec un statut de séjour précaire, pour avoir accès aux soins de santé et s’orienter pour avoir un séjour qui prend en compte les aspects médicaux et avoir des droits sociaux pour des raisons médicales. Permanences téléphoniques : lundi et vendredi : 10-13h et mardi : 14-18h. Tél. 02/274 14 33/34 www.medimmigrant.be Siréas asbl Accompagnement des personnes vivant avec le VIH Service social et service juridique pour les personnes immigrées et réfugiées Rue de la Croix, 22 à 1050 Bruxelles Tél. 02/649 99 58 www.sireas.be

G

Conseil pratique

Modèles d’attestions médicales à l’appui d’une demande de sursis au départ ou d’une autorisation de séjour pour raisons médicales (à remplir par des médecins) : www.medimmigrant.be/ mm.sejour.fr.htm

w w w. pr eventions ida. org

© “One Vision” 2007/Bristol-Myers Squibb - Massimo Mastrorillo/Grazia Neri

Les étudiants étrangers qui suivent un enseignement de jour et qui sont inscrits dans une institution d’enseignement reconnue, doivent demander une attestation d’inscription. Cette attestation d’études suffit pour obtenir une inscription à la mutuelle. Dans un grand nombre de cas, même s’ils ont alors accès aux antirétroviraux, les étudiants doivent supporter des frais annexes qui pèsent très lourdement sur leur budget et compromettent la continuité des traitements.

D’autres barrières se dressent-elles devant les séropositifs ou malades étrangers ? Les personnes vivant avec le

Ithaca Information sur les traitements et l’accessibilité des soins dans le pays d’origine. Site publié par MSF Belgique. www.ithaca-eu.org

principales sources > La loi du 15/12/1980, modifiée le 15/09/2006, telle qu’elle est entrée en vigueur le 01/06/2007 et son arrêté royal du 18/10/1981.

VIH ET DROITS

23

  CPAS et VIH

Le droit à la santé et à l’aide médicale fait partie des droits fondamentaux de la personne, consacrés par la Constitution. Voici un rappel

© Alain Kazinierakis

8

des articles-clés, mais aussi quelques constats de terrain, pour mettre en balance les principes et la pratique. Toute personne peut introduire une demande d’aide sociale auprès du CPAS et ce dernier, sur base de l’enquête sociale à laquelle il est tenu de procéder, déterminera s’il y a lieu d’intervenir et dans quelle mesure. La décision du CPAS sera conditionnée par la question : “l’intéressé a-t-il, oui ou non, la possibilité de mener une vie conforme à la dignité humaine ?”

Les principes de base

Plusieurs dispositions de la loi organique du 8 juillet 1976 prévoient au chapitre IV intitulé “Des missions du centre public d’aide sociale” une intervention du CPAS en matière de soins de santé :

Article 57 § 1er al 3 “Il assure non seulement une aide palliative ou curative mais encore une aide préventive. Cette aide peut être matérielle, sociale, médicale, médico-sociale ou psychologique.” Article 60 § 4 “Il assure, en respectant le libre choix de l’intéressé, la guidance psychosociale, morale ou éducative nécessaire à la personne aidée pour lui permettre de vaincre elle-même progressivement ses difficultés. Il tient compte de la guidance déjà effectuée et de la possibilité de faire continuer celle-ci par l’autre centre ou service auquel l’intéressé a déjà fait confiance.” Article 60 § 5 “Si la personne aidée n’est pas assurée contre la maladie et l’invalidité, il l’affilie à l’organisme assureur choisi par elle, à défaut de ce choix, à la Caisse auxiliaire d’assurance maladie-invalidité. Il exige, dans la mesure du possible, une contribution personnelle de l’intéressé.”

24

VIH ET DROITS

Le CPAS est tenu d’intervenir sans distinction de nationalité, de race, de conviction politique ou religieuse, de statut, de régularité en matière d’assurance maladie-invalidité... La seule réserve imposée par la loi est la limitation de l’aide aux personnes se trouvant en séjour illégal sur notre territoire et qui ont épuisé toutes les voies de recours quant à leur statut. Dans ce cas, l’intervention est limitée à l’aide médicale urgente. (Voir aussi Migrants et VIH). Il est utile de préciser que, de façon générale, les travailleurs sociaux des CPAS, de même d’ailleurs que les autres membres de leur personnel, sont tenus au secret professionnel (voir articles 36 et 50 de la loi organique), dont le non-respect est pénalement sanctionné. Cette obligation revêt bien entendu une importance toute particulière lorsqu’il est question de soins de santé.

Constats de terrain

Les CPAS doivent concrètement mettre ces principes en application. Pour des raisons principalement financières et politiques découlant de l’autonomie communale, la loi organique est mise en application différemment par chaque centre. Il n’existe pas d’harmonisation concernant l’aide sociale publique en Belgique. Les procédures d’octroi de l’aide varient d’une commune à l’autre. En voici trois illustrations. 1/ Le droit du libre choix du prestataire de soins. Le droit de choisir l’hôpital ou le service médical n’est souvent pas illimité. Principalement dans les grandes villes, des CPAS ont signé des conventions avec un ou plusieurs hôpitaux, maisons médicales, médecins généralistes... Ils demandent alors à leurs clients de choisir des prestataires de soins parmi ceux qui ont signé cette convention. Parfois, la collaboration en matière médicale s’étend également aux pharmaciens et autres paramédicaux tels que kinésithérapeutes, logopèdes...

Par exemple, certains CPAS de l’agglomération bruxelloise ont des conventions avec les hôpitaux du réseau public IRIS. Néanmoins, si un CPAS oriente un patient vers un hôpital différent de celui où ce patient est déjà en traitement (ou de celui où il préférerait être soigné), il est possible, d’introduire un recours auprès du conseil du CPAS en expliquant ses motivations. Un tel recours peut mettre en avant une relation de confiance instaurée par le patient avec son médecin, contribuant notamment à une bonne adhérence au traitement. Aucun choix n’est anodin : proximité ou, au contraire, éloignement du lieu de vie, sexe, âge et nationalité du médecin, cadre géographique ou organisation de la consultation. Si cette démarche reste sans effet sur la décision du CPAS, avec l’aide d’un avocat, un recours peut être introduit contre cette décision auprès du tribunal du travail. 2/ La notion d’urgence. La notion d’urgence peut être mise à mal par la procédure administrative qui exige d’attendre la décision d’un conseil ou le respect d’un délai réglementaire pour répondre à une demande d’aide. Ce délai est variable d’un CPAS à l’autre. Cependant, tous les CPAS ont une procédure administrative d’urgence. L’assistant(e) social(e) du CPAS connaît et peut expliquer la procédure à suivre. Dans le cas particulier d’un traitement antirétroviral, cette impossibilité à réagir rapidement peut être lourde de conséquences pour le patient. Ce décalage entre les temps de réponse de certains CPAS et la nécessité de commencer rapidement un traitement ou de ne pas l’interrompre, fait partie du quotidien des patients et des réalités de travail avec lesquelles les assistants sociaux doivent composer. c a s véc u

Des cas délicats sont aussi les périodes de transition vécues par les demandeurs d’asile dans le cours de leur procédure. Pris en charge à leur arrivée par un centre d’accueil, ils se voient ensuite désigner un CPAS de référence. Il s’agit, pour les travailleurs de terrain, d’être prévoyants et d’entamer les démarches au plus vite pour éviter au maximum les ruptures de traitement. 3/ Diversité des modes de fonctionnement Une autre particularité réside dans la diversité des modes de fonctionnement : > Les modalités de l’aide accordée diffèrent de l’un à l’autre. Certains CPAS de référence exigent que leurs clients se rendent sur place pour recevoir leur aide financière, sans tenir compte de l’état de santé de la personne ou du coût et de la longueur du trajet en transport en commun. > Certains octroient une prise en charge médicale pour un an, tenant compte qu’il s’agit d’une pathologie chronique. D’autres exigent un réquisitoire pour chaque soin. > Certains donnent un réquisitoire sur base d’un simple coup de fil, d’autres exigent des documents écrits officiels. > Certains donnent d’office une carte pharmaceutique qui permet de se procurer des médicaments à frais réduits. D’autres exigent du prescripteur une liste détaillée des traitements prescrits et de leur coût. > Certains CPAS paient les frais médicaux en attendant l’affiliation à un organisme assureur et l’obtention du statut de bénéficiaire de l’intervention majorée (anciennement “VIPO”). D’autres interviennent encore pour la quote-part patient si les frais médicaux sont importants.

G

Conseil pratique

Pensez à toujours demander un accusé de réception de votre démarche. Obtenir une réponse écrite et motivée est indispensable. Ces documents seront utiles si, les négociations ayant échoués, il est nécessaire d’introduire un recours devant un tribunal.

Face à cette absence de pratique commune en la matière, les travailleurs sociaux se doivent d’éclairer au mieux les bénéficiaires sur leurs droits en la matière. w w w. pr eventions ida. org

Cet exemple rappelle qu’il existe des travailleurs sociaux qui méconnaissent les difficultés liées à certaines maladies comme le VIH sida.

© Alain Kazinierakis

Après avoir obtenu par téléphone l’accord de l’employé du CPAS pour payer son traitement, une personne sans sécurité sociale, suivant la consigne, s’est rendue dans la pharmacie désignée. Avant de délivrer le traitement, le pharmacien a voulu vérifier cet accord en téléphonant au CPAS. Entendant le coût annoncé par le pharmacien, l’employé a retiré son accord : “C’est trop cher, il va falloir demander au conseil”. Le patient, lui, ne peut arrêter son traitement en attendant la décision du conseil.

VIH ET DROITS

25

H Témoignage Benoît, 38 ans

Ma séropositivité n’est pas liée à la prison : j’ai été contaminé et dépisté bien avant d’être incarcéré. J’ai également commencé mon traitement en dehors du système carcéral. Depuis mon incarcération, j’ai connu plusieurs établissements pénitentiaires. Quand je suis entré en prison, j’ai d’emblée prévenu le service médical de mon état sérologique. Un dépistage a été réalisé et une prise en charge envisagée dans la foulée des résultats. Dans l’établissement pénitentiaire où je suis actuellement, je reçois mes médicaments en cellule, je fais une prise de sang tous les 3 mois et le suivi se fait ici, en interne. Mais dans un autre établissement, je devais aller à l’infirmerie pour prendre mon traitement et pour les analyses et le suivi, on me transférait dans un autre établissement où il y avait un plus gros service médical.

Ici en prison, je ne parle pas de ma séropositivité, je reste très discret

9

Dans l’ensemble, je suis assez satisfait du suivi en prison, à part le fait que pour voir le médecin (notamment pour obtenir les résultats), je dois faire une demande, c’est fort administratif, ça prend du temps et en plus je ne sais pas sur quel médecin je vais tomber. Or, pour tout ce qui concerne ma séropositivité, je suis plus à l’aise avec un médecin précis. Dehors, j’étais suivi par le même médecin, c’était plus facile. Ici en prison, je ne parle pas de ma séropositivité, je reste très discret, je laisse tous les papiers à l’infirmerie, rien dans ma cellule. Ici, les gens font vite des allusions, ils sont indiscrets et tout se sait très rapidement. Et si ça se sait, les gens peuvent mettre la pression pour me faire changer de section ou même de prison. Je me méfie des autres détenus et des membres du personnel. J’ai déjà eu un problème avec un autre détenu qui a cherché à savoir ce que j’avais comme problème de santé, en fouillant dans ma cellule. C’était très grave, je me suis plaint à la direction qui m’a soutenu et fait en sorte que je n’ai aucun problème. Mais, depuis, j’ai tout de même l’impression que les gens font des allusions aux infections sexuellement transmissibles juste quand je suis là, qu’on me lance des vannes. Le détenu en question a peut-être eu le temps de dire des choses... je trouve qu’en prison il n’y a pas de copains.

  Sida et prison Les prisons n’échappent évidemment pas à l’épidémie de sida. Bien qu’aucune statistique récente n’en atteste, le risque de contamination par le VIH et les hépatites est augmenté en milieu carcéral.

26

VIH ET DROITS

Le manque d’information des détenus et du personnel, la grande difficulté de se procurer certains moyens de prévention et la circulation de drogues dont le matériel d’administration est souvent partagé constituent, en effet, un contexte dans lequel la prise de risques est supérieure à celle de la population générale. Le Service public fédéral Justice est le seul responsable des soins de santé en milieu carcéral. Les particularités du monde carcéral (milieu fermé,

cadre punitif et sécuritaire, surpopulation, manque de moyens, mouvements d’humeur tant au niveau du personnel que des détenus, etc.) peuvent engendrer des comportements contradictoires à ce qui est mentionné ci-dessous, notamment en terme de discrimination et de prévention. En effet, une directive émanant de l’administration pénitentiaire peut ne pas être respectée localement par certains individus. Il se peut donc que la réalité diverge des principes officiels, et d’une prison à l’autre. Si un tel

cas se présente, les détenus peuvent contacter le Service médical et la commission de surveillance.

Y a-t-il une ségrégation à l’égard des séropositifs dans les prisons ? Officiellement, il n’y a pas de différence de traitement. Bien entendu, certaines pressions du personnel et des codétenus peuvent parfois déboucher sur des discriminations (comme par exemples l’écartement d’un travail en cuisine, un changement de cellule, etc.). Le statut sérologique n’étant pas consigné dans le dossier pénitentiaire du détenu, il n’intervient normalement pas dans les décisions administratives. Les détenus séropositifs ne sont pas placés dans des ailes ou des cellules séparées. Si l’état de santé d’un de ses patients le nécessite, le médecin de la prison peut demander une cellule en solo ; cette demande ne doit pas être motivée auprès de l’administration pénitentiaire. Les détenus séropositifs qui veulent occuper un travail en prison doivent, comme tout autre détenu postulant à un emploi, passer une visite médicale afin de juger de leur aptitude pour ce poste. Les éventuelles restrictions que le médecin peut formuler sont uniquement d’ordre médical et ne doivent pas être motivées auprès de l’administration pénitentiaire.

Fait-on des tests VIH dans les prisons ? Les personnes entrant en

ce service pour suppléer au manque de personnel infirmier – situation de plus en plus rare – est également tenu au secret professionnel. Les détenus n’ont accès à aucun résultat ne les concernant pas ; pas même ceux qui sont en charge du nettoyage des locaux du Service médical.

Quelle est la prise en charge des détenus séropositifs ? Tous les détenus séropositifs ont accès aux traitements, qu’ils soient en Maison d’Arrêt ou en Maison de Peine. Ils reçoivent un suivi médical réalisé par des médecins infectiologues attachés aux prisons de Bruges, Lantin ou St Gilles, dont les centres médicaux s’apparentent à une polyclinique ou un petit hôpital. Ces consultations nécessitent des transferts (parfois de quelques jours) mais le détenu retourne, dès que possible, à sa prison d’attache où son traitement sera poursuivi. Pour les détenus traités avant leur incarcération, le traitement initié à l’extérieur est poursuivi. Le régime alimentaire n’est malheureusement pas toujours adapté par manque de moyens ou manque de connaissance. Lorsqu’ils sont libérés, les détenus ne connaissent normalement pas de problème de prise en charge des traitements. En effet, durant leur incarcération, ils sont sensés avoir été mis en ordre de mutuelle : à leur libération, ils entrent donc dans le circuit de la Sécurité sociale.

incarcération sont normalement soumises à une visite médicale durant laquelle le médecin peut leur proposer une prise de sang avec dépistage. Durant l’incarcération, les tests VIH/hépatites sont, comme à l’extérieur, pratiqués à la demande du détenu ou recommandés par le médecin. Les tests recommandés par le médecin ne sont jamais obligatoires ; le détenu a le droit de refuser selon la loi sur les droits du patient du 22/08/2002, sauf mention contraire dans la loi de principe (les exceptions ne concernent pas le dépistage).

En prison, peut-on faire appel à son médecin traitant ? Selon l’article 91 de la loi de principe, un détenu a le droit de voir un médecin librement choisi pour un avis ou, si cela a été autorisé, pour un traitement. Les frais de visite de son médecin traitant sont à sa charge. Par contre, le Service des soins de santé des prisons prend en charge les frais des visites et examens médicaux demandés par le médecin attaché à la prison.

Les résultats d’un test sont-ils gardés confidentiels ? Théoriquement, les

La prévention du sida est-elle possible en prison ? Le caractère sécuritaire et la surpopulation réduisent les efforts de prévention du sida à des initiatives personnelles ou des interventions d’organismes extérieurs comme par exemple le Service Éducation pour la Santé, Modus Vivendi et leurs opérateurs Boule de Neige. Des préservatifs sont mis à disposition gratuitement dans divers lieux selon les établissements : les infirmeries, les salles de visites intimes, etc. Théoriquement, les détenus peuvent disposer à la cantine et en section d’eau de Javel pour toute désinfection qu’ils jugeraient utile. Le matériel stérile d’injection et de sniff n’est pas disponible dans les établissements.

résultats des tests sont communiqués au détenu lors d’une consultation médicale. Dans la pratique, beaucoup de dysfonctionnements sont signalés à ce propos. Les données médicales de chaque détenu sont consignées dans son dossier médical, uniquement accessible au personnel de l’infirmerie. Ni le directeur, ni les surveillants n’y ont accès et ce dossier médical n’influence normalement pas le déroulement de sa détention. Tout le personnel attaché au Service médical est soumis au secret professionnel, quelle que soit sa fonction. Le personnel de surveillance affecté à

Qui peut vous aider en prison ? Service Éducation pour la Santé - asbl Projet de prévention du sida, des hépatites et autres IST : groupes de détenus contacts - santé, groupes d’agents relais - santé, distribution de préservatifs et lubrifiant à base d’eau et de brochures de prévention, dont la carte aide-mémoire, etc. Projet de rencontres santé. Modus Vivendi - asbl Coordination des opérations “Boule de Neige” et publication de la brochure de promotion de la santé “Et vogue la galère” qui répond aux questions que peut se poser un détenu en milieu carcéral : hygiène, relation avec sa famille, traitement de substitution. Disponible sur demande à l’infirmerie de la prison.

© Alain Kazinierakis

w w w. pr eventions ida. org VIH ET DROITS

27

© Manuel Abramowicz - CECLR

H interview Edouard Delruelle, Directeur francophone du Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme

Depuis la nouvelle loi antidiscrimination du 10 mai 2007, avez-vous reçu beaucoup de plaintes pour des cas de discrimination basée sur l’état de santé actuel ou futur ?

Enfin, quand l’approche conciliante ne donne pas de résultats, le Centre peut se constituer partie civile. Il arrive, si le cas signalé est manifestement grave, que nous décidions d’aller directement en justice. En moyenne, le Centre se constitue partie civile dans 5 % des cas de discrimination qui lui sont signalés.

C’est encore trop tôt pour le dire, il faut plus de recul car la loi date seulement de mai de cette année. On peut cependant parler des plaintes des années précédentes puisqu’il était déjà possible de porter plainte pour discrimination non raciale. Les signalements de discriminations sur base de l’état de santé comptent pour environ 10 % du total des plaintes pour motif non racial. Les autres principaux motifs sont le handicap et l’orientation sexuelle. L’état de santé arrive donc en troisième position. En chiffres absolus, cela représente une soixantaine de signalements par an.

Choisir d’aller en justice est utile pour deux raisons : tout d’abord, pour aider la personne discriminée, ensuite, pour créer de la jurisprudence. Le Centre est attentif aux cas qui lui semblent susceptibles de faire évoluer la jurisprudence au bénéfice de la collectivité. Ainsi, en 2006, un jugement a été rendu donnant raison au Centre et à madame D., une personne souffrant d’épilepsie. Elle s’était vue refuser un emploi sur base de son état de santé. À cette occasion, pour la première fois en droit du travail, le mécanisme introduit dans la loi du 25 février 2003 (et qui se retrouve dans la loi du 10 mai 2007) a été appliqué. Ce dernier oblige l’auteur des faits à prouver qu’il n’a pas discriminé, ce que la directrice de madame D. n’avait pu faire en l’occurrence.

Les personnes séropositives s’adressent-elles aussi à vous ? Le Centre a reçu 13 plaintes en 2006. Mais rappelons que les plaintes qui arrivent au Centre ne sont que la face visible de l’iceberg. Parmi toutes les discriminations qui ont lieu, seulement une minorité sont signalées au Centre. Parfois, ceux qui sont discriminés ignorent leurs droits, ou alors, ils ont peur des représailles ou craignent de devoir dépenser beaucoup d’argent dans un procès. C’est pourquoi il est important de mettre en perspective ce chiffre qui pourrait paraître bas.

À propos de la médiation, pouvez-vous donner un exemple qui concernerait les personnes séropositives ?

Ces personnes s’adressent-elles à vous pour un type de problème particulier ?

Par ailleurs, le Centre est aussi en négociation avec des secteurs tels que ceux de l’assurance, de l’emploi ou du logement. Actuellement, avons des discussions en cours avec Assuralia en ce qui concerne l’“assurabilité” des personnes séropositives. Nous travaillons d’ailleurs en réseau avec les associations concernées.

Les trois cas classiques – en ce qui concerne les plaintes portant sur une discrimination basée sur l’état de santé – sont : le licenciement, le test de dépistage à l’embauche et les refus de demande de crédit ou d’assurance solde restant dû. En résumé, ce qui concerne l’accès aux biens et services ou à l’emploi.

Comment pouvez-vous aider ou traiter ces demandes ? En commençant par écouter les deux parties. Il arrive qu’informer les parties de leurs droits et devoirs respectifs permette déjà de résoudre une situation conflictuelle. D’autres fois, il faut prendre le temps de discuter un peu plus et de négocier le retrait d’une décision prise ou un aménagement raisonnable. Nous sommes encore dans la conciliation informelle. Le Centre peut aussi jouer le rôle plus formel de médiateur entre parties. 28

VIH ET DROITS

Lorsque nous optons pour la médiation, nous travaillons au cas par cas. Comme s’adresser à un employeur particulier qui aurait, par exemple, licencié un(e) employé(e) en raison de son nouveau handicap. Le Centre peut par exemple lui demander d’envisager un aménagement raisonnable.

Je pense être victime d’une discrimination, comment dois-je m’adresser au Centre ? Vous pouvez signaler la discrimination au Centre de plusieurs manières : via le site Internet, en nous écrivant, en prenant un rendez-vous ou en vous rendant à une de nos permanences le jeudi matin. Si vous choisissez d’écrire un e-mail, n’oubliez pas d’indiquer vos nom, prénom et adresse. Une simple adresse e-mail ne permet pas de vous identifier correctement ; or, les sollicitations anonymes ne sont pas prises en compte. Ensuite, donnez un maximum d’informations, d’explications circonstanciées, et – autant que possible – des preuves.

C’est quoi une plainte qui n’est pas fondée ? Question importante ! Je vais donner un exemple provocateur, mais c’est pour les besoins de la démonstration. Prenons le contexte de l’embauche. Disons qu’une personne séropositive est considérée inapte physiquement, à cause de sa séropositivité, pour un travail auquel elle avait postulé. Il n’y a pas de discrimination, à deux conditions : d’abord que l’employeur ait une justification fondée, mais aussi qu’un aménagement raisonnable soit impossible. Dans notre cas de figure, le refus d’embaucher n’est donc pas fondé sur la séropositivité du candidat (sinon ce serait une discrimination), mais sur les conséquences de cet état, incompatibles avec les exigences requises pour occuper le poste. Il y a deux questions clés à retenir : existe-t-il, oui ou non, une justification fondée ? Est-il possible, oui ou non, d’effectuer des aménagements raisonnables ? Si vous répondez oui à la première, et non à la deuxième, il n’y a pas de discrimination.

Et comment apporter les preuves d’une discrimination ? Conserver toutes les pièces écrites, recueillir des témoignages (sans pour autant pousser à la délation) et mettre par écrit tous les détails de l’événement avant que le temps ne rende le récit moins cohérent.

Le Centre pour l’égalité des chances dépend des instances fédérales, est-il compétent au niveau des Régions et des Communautés ? Le Centre est compétent au niveau fédéral pour tout le secteur privé (les relations employeurs/employés par exemple) et pour le secteur public fédéral (le SPF Emploi, SPF Justice, la Police Fédérale, etc.). Mais il est vrai que nous ne pourrons pas ester en justice sur la base d’un décret d’une Communauté ou d’une Région. Ainsi, si on refuse un logement social à une personne (pour une raison discriminante), le Centre ne pourra pas se porter partie civile, car le logement social dépend des Régions. C’est la même chose pour les transports en commun ou l’enseignement.

Comprenez-vous les gens qui se découragent face aux discriminations ? Il ne faut pas se décourager ! Trop de personnes, usées par les refus, les humiliations, les attitudes de rejet, n’y croient plus, sont presque “habituées” à être discriminées. Pourtant, c’est en signalant les discriminations qu’on les fera sortir de l’ombre. Le Centre doit avoir l’occasion d’aller en procès, de faire évoluer la jurisprudence et, pas à pas, de changer les pratiques, les attitudes et, à terme, les mentalités. Un autre message que j’aime faire passer est qu’il n’y a pas de gentils discriminés et de méchants employeurs, assureurs ou propriétaires. Les gens sont en général de bonne volonté. Beaucoup ne sont pas informés ou conscients de ce qui est condamné par la loi. Comme on l’a vu avec le handicap, le regard sur l’autre peut changer ; cela doit passer par un gros travail de sensibilisation. Mais quels que soient les motifs de discrimination, mon souhait est double : que les personnes ne pensent pas d’emblée que toute la société leur est hostile, car ce n’est pas le cas, mais qu’elles n’hésitent pas à se battre si elles sont victimes de discrimination. Il ne faut surtout rien laisser passer.

Estimez-vous que le Centre est suffisamment connu du public ? Pas encore assez connu ! Il est généralement associé à la lutte contre les discriminations raciales. Le public général n’est pas encore assez conscient et informé de ce que nous faisons en matière de discriminations non raciales. Les autres critères discriminants sont pourtant nombreux : âge, sexe2, orientation sexuelle, convictions politiques, religieuses et, évidemment, l’état de santé actuel ou futur (liste non exhaustive). Pour lutter contre les discriminations, la Belgique dispose d’un dispositif législatif remarquable, un des meilleurs d’Europe. A nous tous – le Centre, les associations, les pouvoirs publics, mais aussi les citoyens – de le faire respecter et de changer les mentalités... w w w. d i ver s ite. be w w w. pr eventions ida. org

Néanmoins, le Centre peut toujours agir comme conciliateur ou médiateur auprès de l’autorité compétente. Les Régions et Communautés reconnaissent au Centre son expertise en matière de discrimination, et donc généralement elles collaborent avec nous. D’ailleurs, il existe un projet d’“Accord de coopération” entre les entités fédérales et fédérées, qui ferait du Centre un centre “interfédéral” compétent à tous les niveaux de pouvoir. Mais pour voir cet accord aboutir, il faut attendre la formation du prochain gouvernement1 ...

(1) Interview réalisée en septembre 2007. (2) Les cas de discrimination basée sur le genre sont traités par l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes. (IEFH)

VIH ET DROITS

29

10

 A ssuré pour se rassurer, ce qui est possible © “One Vision” 2007/Bristol-Myers Squibb - André Boto

Cet été 2007 a vu une petite révolution dans le monde des assurances. Elle s’est faite au bénéfice des personnes touchées par un problème de santé comme, par exemple, la séropositivité. Le législateur a voulu leur faciliter l’accès aux assurances hospitalisation complémentaires. Les textes sont entrés en vigueur tout récemment. En attendant d’observer leur mise en pratique, en voici les grandes lignes. En vertu du droit belge, c’est la personne qui souhaite souscrire à un contrat d’assurance qui doit fournir à l’assureur toutes les informations nécessaires pour évaluer le risque à assurer. Mais que faut-il entendre par “nécessaire” ? Afin de “faciliter la tâche” du futur assuré et de s’octroyer une garantie quant à l’obtention de toute l’information nécessaire, les compagnies d’assurance adressent en général des questionnaires détaillés aux candidats à l’assurance. Ces questionnaires portent sur l’état de santé actuel et passé du candidat à l’assurance, sur son mode de vie ainsi que, dans certains cas, sur ses antécédents familiaux. Si la loi du 25 juin 1992 relative aux assurances interdit les tests génétiques, la pratique des prises de sang aux fins, notamment, de pratiquer un test de dépistage VIH n’est pas formellement interdite par cette loi.

Dans quelles conditions une compagnie peut-elle exiger un test VIH ? Dans un avis du 16 octobre 1993, le Conseil national de l’Ordre des médecins a rappelé les principes déontologiques que doivent respecter les médecins face à l’épidémie de sida. Il précise notamment la manière dont doit être exécuté un test VIH à la demande d’une compagnie d’assurance. 30

VIH ET DROITS

> “Si une compagnie d’assurance prévoit un test VIH dans le cadre de la conclusion du contrat, le médecin examinateur ne peut demander ce test qu’avec le consentement éclairé de l’intéressé” ; > “Le médecin examinateur doit avertir l’intéressé qu’en vertu de sa mission, il est tenu d’informer le médecin-conseil de la compagnie d’assurances tant de son éventuel refus que du résultat du test” ; > “Ce médecin-conseil doit faire connaître, à l’intéressé et/ou au médecin traitant désigné par ce dernier, les résultats de l’examen effectué en vue de la conclusion du contrat. Le candidatassuré doit en effet avoir la possibilité de renoncer à la conclusion du contrat d’assurance avant que le médecin-conseil ne transmette une quelconque information médicale à l’assureur.”

Du nouveau en matière d’assurance contre la maladie Deux lois récentes ont modifié les conditions qui régissent l’octroi d’une assurance hospitalisation tant par les compagnies privées d’assurance que par les mutuelles. La loi du 20 juillet 2007 applicable aux assurances privées prévoit la conclusion à vie des contrats d’assurance hospitalisation ainsi que des assurances revenu garanti. Il n’est donc plus possible pour l’assureur de rompre un contrat d’assurance si la maladie survient après sa signature, sauf si l’assuré

a demandé, dans son intérêt, la limitation de la durée du contrat. Si le sida se déclare, certaines compagnies tenteront peut-être d’obtenir la nullité du contrat en faisant valoir que l’assuré connaissait sa séropositivité avant la signature et qu’il a donc fait une fausse déclaration ou une omission. La loi du 20 juillet 2007 prévoit dorénavant l’impossibilité pour l’assureur d’invoquer une omission ou une inexactitude dans les déclarations de l’assuré dès lors que deux ans se seront écoulés après la signature du contrat. C’est la règle de l’incontestabilité. Toutefois, en cas de mensonge ou d’omission volontaires de la part de l’assuré, l’assureur dispose de deux ans pour apporter la preuve de l’existence d’une fraude dans le chef de l’assuré. Cette même loi prévoit également l’obligation pour les assureurs de faire bénéficier de l’assurance hospitalisation les personnes qui, au moment de la conclusion du contrat, souffrent d’une maladie chronique ou d’un handicap et moyennant un taux de prime identique à celui qui est imposé aux personnes non malades qui souscrivent à ce type d’assurance. La loi prévoit toutefois pour l’assureur, la possibilité d’exclure de la couverture les coûts directement liés au problème de santé préexistant et connu lors de la signature du contrat. L’innovation pour les personnes séropositives réside donc dans le droit d’obtenir un contrat d’assurance hospitalisation à vie, les assureurs ne pouvant plus ni refuser de les assurer, ni les assurer moyennant une surprime exorbitante. u n e x e m pl e Vous vous cassez une jambe en tombant dans les escaliers. L’assurance hospitalisation devrait couvrir les frais puisqu’ils n’ont pas de rapport avec votre séropositivité

Enfin, cette loi prévoit qu’un assuré qui bénéficiait d’une assurance collective conclue par son employeur puisse, dès lors qu’il change d’emploi ou de statut professionnel, continuer à bénéficier de la même couverture d’assurance sans questionnaire ou examen médical complémentaire, l’évaluation du risque étant réalisée sur base des données qui ont présidé à la conclusion du contrat initial. La prime à payer pour l’assuré à titre individuel sera toutefois plus élevée en raison du passage de la catégorie des assurances collectives à celle des assurances individuelles.

La loi du 11 mai 2007 offre une meilleure accessibilité aux assurances hospitalisation des mutualités pour les personnes malades chroniques ou présentant déjà un état de santé déficient. En effet, en vertu de cette loi, les mutualités seront obligées d’accepter l’affiliation à un service assurance hospitalisation de toute personne satisfaisant aux conditions légales ou réglementaires pour être membre d’une mutualité. Les mutualités peuvent toutefois limiter l’âge de l’affiliation à 65 ans. Si une personne change de mutualité, elle devra bénéficier de l’assurance hospitalisation de sa nouvelle mutualité sans qu’un stage d’attente ne lui soit imposé pour autant qu’elle ait été en ordre de cotisation dans son ancienne mutualité et qu’elle soit déjà affiliée à un service hospitalisation ou indemnités journalières dans la mutualité d’origine. Lorsqu’une personne séropositive souhaite souscrire à une assurance hospitalisation proposée par une mutuelle, elle devra remplir un questionnaire médical mais l’assurance ne pourra pas lui être refusée. Comme les assurances privées, les mutualités pourront toutefois prévoir une limitation de leur intervention sur base d’un forfait ou du tarif “chambre commune”. Aucune majoration des cotisations ne pourra être facturée à la personne séropositive ou malade du sida qui souhaite souscrire une assurance hospitalisation auprès d’une mutualité.

a t t e n t ion Les dispositions de ces nouvelles lois entrées en vigueur le 1er juillet 2007 et relatives à l’obligation d’assurer à vie les malades chroniques et les personnes handicapées seront d’application jusqu’au 31 décembre 2008 pour les mutuelles et jusqu’au 30 juin 2009 pour les assurances privées. Ce qu’il adviendra ensuite (maintien ou non de l’obligation) dépendra des résultats d’une évaluation qui doit avoir lieu au plus tard le 1er octobre 2008 pour les mutualités et au plus tard le 31 décembre 2008 pour ce qui concerne les compagnies d’assurance

Puis-je contracter une assurance vie ? Aujourd’hui, bon nombre de compagnies d’assurance soit refusent d’octroyer une assurance vie ou solde restant dû à une personne séropositive, soit proposent des contrats à une personne séropositive mais moyennant de fortes surprimes et une assurabilité limitée dans le temps (de 3 à 7 ans au mieux). Les compagnies expliquent baser ces limitations sur les statistiques épidémiologiques liées à la maladie et à l’évolution des traitements. Face à cet état de fait, le meilleur conseil à prodiguer au candidat à l’assurance vie est de s’informer auprès du plus grand nombre de compagnies possible afin d’y déceler la meilleure offre. w w w. pr eventions ida. org

principales sources > Loi du 20 juillet 2007 sur les contrats privés d’assurance maladie. > Loi du 11 mai 2007 relative aux mutualités .

VIH ET DROITS

31

11

 L e VIH en voyage :

Triste constat. La moitié des États membres de l’ONU appliquent des mesures discriminatoires à l’encontre de la liberté de circulation et de l’attribution des permis de séjour des personnes vivant avec le VIH/sida.

Face à cette situation, des associations de lutte contre le sida collectent et recoupent des informations auprès des ambassades, des ONG, des voyageurs, pour permettre aux personnes séropositives de se déplacer en prenant les précautions nécessaires. Des bases de données sont disponibles sur Internet et mises à jour régulièrement. Conseil pratique

H

Sur Internet : Un guide de référence sur les réglementations applicables aux déplacements et aux séjours des personnes vivant avec le VIH/ sida est disponible sur : www.aides.org (site français) www.eatg.org/hivtravel (en anglais1) + informations sur les États-Unis www.aidsmap.com (en anglais) cliquer sur > Living with HIV > travel.

(1) Informations disponibles sur Internet en septembre 2007. Des traductions en espagnol, portugais, allemand, français et russe seront publiées prochainement. (2) Le vaccin est considéré “safe” pour les personnes sous traitement antirétroviral. Une discussion avec le médecin traitant est indispensable. 32

VIH ET DROITS

Quels sont les pays qui restreignent l’entrée sur leur territoire ? Les réglementations peuvent être divisées en deux catégories : celles qui concernent les visas touristiques de courte durée, en général de un à trois mois et celles, plus sévères, qui s’appliquent aux longs séjours (visa étudiant, travail, immigration). Les visas pour courts séjours de tourisme Le séjour touristique pose le moins de problème. Cependant, en 2006, encore 13 pays sont connus pour refuser catégoriquement l’entrée aux personnes vivant avec le VIH, même pour une courte durée. Parmi ceux-ci on trouve la Chine, la Fédération de Russie et les États-Unis d’Amérique Les séjours de longue durée La situation est bien plus grave : en 2006, plus de 90 États mettent en place des tests VIH obligatoires. En cas de résultat positif – à quelques rares exceptions – le visa ou le permis de séjour est refusé. Ces mesures sont totalement discriminatoires et ces atteintes à la liberté de circulation ne peuvent être justifiées par l’objectif de lutte contre l’épidémie.

La Belgique impose-t-elle des dépistages VIH avant la délivrance d’un visa ? Les associations qui récoltent les informations sur ces pratiques discriminatoires ont aussi épinglé la Belgique. Il semblerait que les étrangers non ressortissants européens doivent passer un test VIH (auprès d’un médecin reconnu par l’ambassade belge de leur pays) s’ils souhaitent obtenir un visa étudiant ou un permis de travail.

Et voyager en Europe ?

Les ressortissants européens peuvent circuler librement dans l’Union européenne (espace Schengen). Mais le fait de recevoir ses médicaments gratuitement en Belgique ne signifie pas nécessairement qu’il en sera de même dans un autre pays européen. Mieux vaut se renseigner auprès de sa mutuelle et auprès des associations dans le pays de destination. w w w. pr eventions ida. org Conseil pratique

H

© “One Vision” 2007/Bristol-Myers Squibb Sergi Camara Loscos

un bagage encombrant ?

comment voyager ? > En vous renseignant au préalable. La manière dont les règlements sont appliqués change vite, parfois pour le meilleur, plus souvent pour le pire. Utilisez tous les réseaux d’information dont vous disposez. > Plusieurs pays, en Afrique notamment, exigent aussi le vaccin contre la fièvre jaune. Les vaccins utilisés pour lutter contre la fièvre jaune peuvent poser problème aux personnes dont le système immunitaire est altéré2. > Enfin, dans les aéroports, n’oubliez pas que les nouvelles mesures de sécurité impliquent l’interdiction d’emmener certains produits (liquides, gels…) en cabine, et que la fouille des bagages est de plus en plus courante. > Munissez-vous d’une ordonnance (en anglais) justifiant de la présence et de la quantité de vos médicaments. > Si nécessaire, utilisez un pilulier ou une autre boîte que celle d’origine pour éviter d’éveiller des soupons. > Transportez vos médicaments dans votre bagage à main, jamais dans la valise enregistrée. > Pensez à l’option de vous procurer les médicaments sur place. Avant votre départ, assurez-vous du remboursement par votre assurance maladie et de la disponibilité de vos traitements à destination.

12

 L e droit au logement Avoir un logement, un chez-soi, est indispensable pour se maintenir en bonne santé. Malheureuse© Alain Kazinierakis

ment, l’accès au logement est un domaine où les discriminations raciales et non raciales sont relativement fréquentes, principalement sur le marché locatif privé.

Puis-je obtenir un logement social ? Les personnes séropositives n’ont pas de points de priorité sur base de leur séropositivité pour une demande de logement social. Les points de priorité ne sont obtenus que quand la personne est reconnue comme handicapée. Mais il y a pénurie de logements sociaux et les listes d’attente sont longues. Demandez de l’aide aux assistants sociaux de votre commune ou de votre mutuelle. Pour faire face à cette pénurie de logements sociaux, les régions ont mis sur pied des agences immobilières sociales. Leur objectif est la recherche de la meilleure adéquation possible entre l’offre de logements disponibles sur le marché du privé et les besoins sociaux recensés au niveau local.

Un propriétaire peut-il résilier mon bail en raison de ma séropositivité ? Non. L’état de santé d’un locataire ne peut pas être un motif de résiliation du bail. En cas de litige à ce propos, le problème résiderait, comme pour le licenciement abusif, dans la possibilité de prouver que la maladie est bien la cause de la résiliation. Les motifs valables pour résilier un bail sont la fin de la durée du bail, des travaux importants à réaliser, l’occupation personnelle du lieu. Cela dit, un propriétaire peut aussi décider de résilier un bail sans motifs, mais il devra alors verser des indemnités, comme c’est prévu par la loi1.

Existe-t-il une aide à l’adaptation du logement ? Rien de spécifique n’est prévu pour les malades du sida. Des handicaps physiques consécutifs à l’infection au VIH peuvent toutefois exiger l’aména-

gement du logement (suppression de seuils, pose de poignées dans la douche...). Si le malade du sida obtient la reconnaissance du statut de handicapé (ce qui suppose un examen médical et un taux minimal d’invalidité), il peut alors introduire une demande d’aide matérielle auprès de l’Agence wallonne pour l’intégration des personnes handicapées ou auprès du Service bruxellois francophone des personnes handicapées. Si le statut de handicapé n’est pas reconnu, il est parfois possible de demander une aide financière au CPAS ou à certaines associations d’entraide. La Croix-Rouge et certaines mutuelles proposent aussi la location d’accessoires utiles pour des sommes modiques.

Ai-je accès aux Fonds du Logement ? La Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale ont prévu des Fonds de prêt destinés à faciliter l’accès à la propriété pour les ménages ayant des revenus trop faibles pour obtenir un emprunt hypothécaire dans le secteur privé. Mais peuvent-ils aussi venir en aide aux personnes qui ne peuvent accéder à ce marché pour des raisons de santé ? L’exigence de prendre une assurance-vie à côté de l’emprunt représente un obstacle difficilement surmontable pour les personnes séropositives. Soit le contrat est refusé, soit la prime d’assurance est beaucoup trop chère. En principe, ces Fonds exigent aussi que l’emprunteur contracte une assurance-vie. Mais les mentalités sont en train d’évoluer favorablement. L’art. 27 du règlement du Fonds de la Région wallonne prévoit déjà que : “[...] Lorsque, pour motifs de santé, l’emprunteur n’est pas agréé par un assureur, le Fonds peut, à son gré, soit consentir le prêt sans exiger qu’il soit couvert par une assurance-vie, soit faire contracter l’assurance-vie sur la tête d’un autre membre de la famille, dont les revenus sont suffisants.[...]”

G

Conseil pratique

Ne vous laissez pas conter d’histoires par votre propriétaire et ne signez jamais rien sans vous être renseigné au préalable. Si vous êtes trop malade pour déménager, vous pouvez demander au juge de paix de vous accorder une prolongation de la location pour situation particulière.

G

Bon à savoir

Lhiving asbl est une association qui accompagne les personnes défavorisées avec VIH, leur famille ou leur entourage immédiat, entre autres dans la recherche de logement. Tél./fax : 02/201.14.19 e-mail : [email protected]

(1) Loi du 20 février 1991, modifiée le 25 avril 2007. VIH ET DROITS

33

Pour en savoir plus

H

La discrimination au logement : comment réagir ? Informations pratiques Brochure publiée par Le Centre pour l’égalité des chances, 2007 Internet : www.diversite.be g rubrique “égalité des chances – logement ” Elle peut également être commandée (gratuitement) auprès du Centre par téléphone  0800/12 800

13

L’art. 24 du règlement du Fonds du Logement de Bruxelles est plus strict : “L’emprunteur doit, sauf exception acceptée par le Fonds, contracter une assurance-vie, auprès d’un assureur inscrit à l’Office de Contrôle des Assurances avant la conclusion du prêt hypothécaire”. Mais, conscient du problème, le Fonds du Logement de Bruxelles est actuellement en train de réviser cette disposition du règlement. Il existe donc une chance de pouvoir négocier au cas par cas.

Ces Fonds peuvent offrir d’autres formes d’aides, par exemple, un logement à loyer modéré pour lequel aucune assurance-vie n’est exigée. w w w. pr eventions ida. org

 P our le meilleur et pour le pire

Depuis 1998, les couples, tant hétéro- qu’homosexuels, ont accès à la cohabitation légale. Et plus récemment, depuis l’entrée en vigueur de la loi du 13 février 2003, le mariage est également ouvert aux personnes homosexuelles. Voici un petit précis du mariage et de la cohabitation légale.

> La cohabitation légale Légalement... (loi du 23 novembre 1998)   > La cohabitation légale se scelle par une déclaration officielle devant l’officier d’état civil à la commune. > Elle n’entraîne de devoirs ni de fidélité, ni de secours et assistance. > Elle assure une contribution réduite à la charge du couple. > Elle règle la protection du logement des cohabitants. (1) Pour connaître les différents taux des droits de succession, vous pouvez consulter le site Internet de la Fédération royale du Notariat belge (www.notaire.be).

34

VIH ET DROITS

Quand ça ne va plus... Si les cohabitants légaux souhaitent mettre un terme à leur contrat, ce dernier est révocable ad nutum. Un seul des deux cohabitants peut y mettre fin et l’autre n’a pas le droit de s’y opposer.

En cas de décès…

La loi du 28 mars 2007 protège le cohabitant légal survivant en cas de décès d’un des cohabitants légaux. Le survivant bénéficie en effet du taux de droits de succession le moins élevé, c’est-à-dire celui applicable aux conjoints et enfants. Le montant des droits de succession à payer par le cohabitant survivant varie selon les régions du pays (Bruxelles-Capitale, Wallonie, Flandres)1. Depuis une réforme récente, même en l’absence de tout testament rédigé en sa faveur, le cohabitant légal survivant recueille l’usufruit (si le couple est propriétaire) ou le droit de bail (si le couple est locataire) de l’immeuble affecté à la résidence commune du couple ainsi que des meubles qui le garnissent. Le droit d’usufruit implique le droit, pour le cohabitant survivant, d’utiliser le bien jusqu’à sa mort ou de le louer.

Le cohabitant légal survivant a des obligations envers les éventuels enfants du défunt et, dans certains cas, envers les parents du défunt.

> Le mariage Légalement…

(loi du 13 février 2003) : Le mariage est un acte d’état civil qui entraîne des droits et des devoirs légaux d’ordre public auxquels on ne peut déroger : fidélité ; secours et assistance ; contribution aux charges du mariage à proportion des facultés respectives ; protection globale du logement familial et de la résidence conjugale ; obligation de cohabitation et de relations sexuelles et obligation d’obtenir l’autorisation du conjoint pour faire un emprunt. > Une circulaire du 23 janvier 2004 ouvre ce droit au mariage également aux couples homosexuels dont un des membres est étranger. > Le mariage se scelle par une déclaration officielle devant l’officier d’état civil à la commune et ce avant la célébration. > Avant la célébration, il est donc possible de rédiger chez un notaire un contrat de mariage portant sur le sort des biens respectifs des époux. Si le couple choisit de ne pas signer de contrat de mariage, le régime légal est alors celui de la communauté de biens, ce qui signifie que tout ce qui est acquis dans le mariage tombe dans l’escarcelle commune. Mais les époux sont aussi solidaires par rapport aux dettes contractées tant pendant le mariage qu’après la séparation et avant la dissolution. Si le couple choisit de signer un contrat, ce dernier peut prendre quatre formes : > la communauté de biens : la situation est comparable à la situation sans contrat décrite ci-dessus ; > la communauté réduite aux acquêts : seuls les biens acquis après le mariage tombent dans l’escarcelle commune ; > la séparation des biens pure et simple : les deux patrimoines restent distincts ; > la séparation de biens avec communauté d’acquêts : les deux patrimoines restent distincts mais certaines choses peuvent être mises en commun.

de salaire, c’est-à-dire qu’un revenu peut être prélevé sur le salaire du conjoint sans devoir tenir compte de la bonne volonté de ce dernier car l’autre conjoint a le droit de vivre sur le même niveau de vie que pendant le mariage. Une interdiction d’accès au logement commun peut être demandée. > Un divorce par consentement mutuel, qui suppose de la part des deux époux un accord complet à la fois sur la volonté de rompre le lien conjugal et sur les modalités de cette rupture pendant et après la procédure, le tout étant consigné dans des conventions rédigées par un notaire ou un avocat. > Un divorce pour cause de désunion irrémédiable2, qui suppose que la vie commune n’est plus possible pour des raisons diverses (disputes incessantes, disparition de l’affection...). Cette désunion peut exister même si aucun des deux époux n’a commis de faute (chacun souhaite reprendre sa liberté, les tentatives mises en œuvre pour reprendre la vie conjugale se sont soldées par un échec...). La désunion devra toutefois être prouvée devant le tribunal de première instance du domicile des époux. La demande de divorce pourra être introduite soit conjointement par les deux époux après 6 mois de séparation, soit par un seul des deux époux après un an de séparation.

© Alain Kazinierakis

Après le divorce, le régime matrimonial est dissout et liquidé, c’est-à-dire que l’on va déterminer ce qui est commun et ce qui est propre à chaque ancien conjoint, et procéder au partage.

En cas de décès…

En cas de décès d’un des époux, il est conseillé de prendre contact avec un notaire le plus rapidement possible. C’est lui qui va dresser l’acte de notoriété (déclarant qu’il est de notoriété que les époux étaient bien mariés) et qui va identifier les héritiers. Le conjoint survivant va recevoir la moitié de l’héritage en pleine propriété et l’autre moitié en usufruit (la jouissance). Les droits de succession sont faibles pour le conjoint survivant et sont fonction des sommes héritées. Si les époux n’ont pas d’enfants, ce sont les parents qui ont la propriété de la seconde moitié. Au décès des parents, le conjoint récupère cette partie. w w w. pr eventions ida. org

Quand ça ne va plus… Si le mariage capote, plusieurs solutions s’offrent aux époux : >U  ne séparation devant le juge de paix. Elle est provisoire pour six mois. Elle peut être demandée si un des époux constate un manquement grave aux contributions du mariage ou une mésentente sérieuse. Cette séparation prévoit une délégation

(2) Possible depuis la loi du 27 avril 2007 entrée en vigueur le 1er septembre 2007.

VIH ET DROITS

35

H Quelques

contacts utiles

1. Questions générales sur ses droits ? (Voir aussi chapitre 1) 1.1. Les services sociaux sont gratuits dans les Centres de référence sida (voir les adresses en dernière page) ; 1.2. Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme Rue Royale, 138 - 1000 Bruxelles T : 02-212.30.00 entre 9h00 et 17 h00 Numéro vert (gratuit) : 0800 12.800 F : 02-212.30.30 - E-mail : [email protected] Site : www.diversite.be Permanence le jeudi matin, de 9h30 à 12h30, sans rendez-vous, pour obtenir des conseils sur des questions de racisme, de discrimination ou de séjour. 1.3. L’aide juridique de première ligne offre gratuitement un premier conseil juridique et réoriente si nécessaire vers une instance spécialisée. Ce service est accessible via les maisons de justice ou les Bureaux d’aide juridique. Les permanences ont lieu dans les locaux des maisons de justice où vous pouvez téléphoner: Téléphones des maisons de justice francophones : Arlon Bruxelles Charleroi Dinant Eupen Huy Liège Marche en Famenne Mons Namur Neufchâteau Nivelles Tournai Verviers

063-42.02.80 02-535.92.11 071-23.04.20 082-21.38.00 087-59.46.00 085-71.04.60 04-232.41.11 084-31.00.41 065-39.50.20 081-24.09.10 061-27.51.70 067-88.27.60 069-25.31.10 087-32.44.50

Il y a aussi une permanence dans les annexes du Palais de Justice :19, rue des Quatre Bras, 3e étage. Tous les matins de 9h00 à11h00, plus les lundi, mardi, mercredi de 14h00 à 16h00.

36

VIH ET DROITS

La médiation peut être un alternative au tribunal. T : 078-15.80.84 (appels au tarif local, partout en Belgique, en semaine de 9h00 à 17 h00).

2. Questions sur les droits des patients ? (Voir aussi le chapitre 3) Le Service médiation “Droit du patient” de la SPF Santé publique a publié une brochure intitulée “Une invitation au dialogue”. Cette brochure s’adresse autant aux praticiens qu’aux patients. Elle est disponible gratuitement auprès du SPF Santé publique : e-mail : [email protected] Médiateur fédéral francophone : T : 02-524.85.21 - F : 02-524.85.38 Il existe aussi une service médiation dans chaque hôpital. Pour obtenir la liste et les coordonnées des médiateurs de ces services. Site : www.patientrights.be

3. Questions sur la sécurité sociale ? (Voir aussi chapitre 5 ) 3.1. Vous pouvez vous renseigner auprès des services sociaux des Centre de référence sida (voir adresses sur la dernière page) ou auprès du service social de votre mutuelle. Il existe cinq unions nationales de mutualités : Alliance nationale des Mutualités chrétiennes T : 02- 246.41.11 Site : www.mc.be Union nationale des mutualités libérales T : 02-542.86.00 Site : www.mut400.be Union nationale des mutualités libres T : 02-778.92.11 Site : www.mloz.be Union nationale des mutualités neutres T : 02-538.83.00 Site : www.unmn.be Union nationale des mutualités socialistes T : 02- 515.02.11 Site : www.mutsoc.be

3.2. Pour tous renseignements relatifs aux droits des personnes handicapées: SFP Sécurité sociale, Direction générale des personnes handicapées T :02-507.87.99 - F : 02-509.81.85 SPF Sécurité sociale Direction générale Personnes handicapées rue de la Vierge Noire, 3C, 1000 Bruxelles 3.3. Informations générales sur Internet. Site : www.guidesociale.be

4. Questions sur l’accès au logement ? (Voir aussi chapitre 12) Le Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme peut vous envoyer un catalogue d’adresses reprenant les associations de votre région. Site : www.diversite.be > égalité des chances > logement. Lhiving asbl PB 143 Brussels 21 1210 Bruxelles T/F : 02-201.14.19 E-mail: [email protected] - Site : www.lhiving.be

CIRÉ asbl (Coordination des Initiatives pour et avec les Réfugiés et Étrangers) rue du Vivier, 80/82 - 1050 Bruxelles, Belgique T : 02-629 77 10 F : 02-629 77 33 Site : [email protected] Voir aussi en dernière page Siréas asbl

6. Questions sur les droits des jeunes ? (Voir aussi chapitre 6) Le Service Droits des Jeunes (SDJ) est présent à Arlon, Bruxelles, Charleroi, Liège, Mons, Namur, Verviers et Vielsam. Pour connaître leurs coordonnées et les heures de permanence. Site : www.sdj.be

7. Groupes d’entraide et de parole pour les personnes vivant avec le VIH Plusieurs associations et groupes de parole sont là pour vous écouter et vous aider, sans vous juger, dans le respect de votre anonymat. (Voir les adresses en dernière page)

Le Fonds du Logement des Familles nombreuses de Wallonie (FLW) T : 071-207 711 - F : 071-207 756 Site : www.flw.be

> Aide Info Sida : le “Libre Espace” se tient de 20h00 à 23h00 tous les 2è et 4è vendredis du mois. Ecoute en ligne : 0800 20 120, de 18h00 à 21h00 en semaine. > Siréas : “Espace Mandela”, organisation de soupers et activités socioculturelles. > Sid’Action en Pays de Liège : groupe de solidarité autour du sida pour les personnes concernées de près ou de loin. > Coordination provinciale Sida Assuétudes : groupe de rencontre pour les personnes séropositives et leurs proches; suivi individuel. > CHU de St-Pierre : groupe de parole et séances de formation > CHU de Liège : groupe de parole et suivi individuel. > CHU de Charleroi (Centre A. Rimbaud) : suivi individuel et groupe de rencontre > GRÉCOS : depuis 2005 un groupe de travail se réunit régulièrement afin de construire des outils de communication à l’attention des personnes séropositives. Contact & infos : la Plate-Forme Prévention Sida.

5. Questions sur l’accès au soins pour les migrants ? (Voir aussi chapitre 7)

8. Pour avoir l’adresse d’une maison médicale près de chez vous

Medimmigrant asbl Permanences téléphoniques lundi et vendredi : 10h-13h et mardi : 14h-18h. T : 02-274 14 33/34 Site : www.medimmigrant.be

Fédération des maisons médicales Bd du Midi 25 bte 5 – 5e étage 1000 Bruxelles T : 02- 514 40 14 - F : 02- 514 40 04 E-mail : [email protected] Site : www.maisonmedicale.org

Service bruxellois francophone pour personnes handicapées T : 02-800.80.00 - F : 02-800.81.20 Agence wallonne pour l’intégration des personnes handicapées (AWIPH) T : 0800 160 61 (numéro gratuit) ou T : 071-20.57.11 & F : 071-20.51.04 Site : www.awiph.be Fonds du Logement de la Région de BruxellesCapitale T : 02-504.32.11 - F : 02-504.32.01 Site : www.fondsdulogement.be

VIH ET DROITS

37

Les organismes de prévention

du sida en Communauté française 1) Les associations thématiques.

3) Suivi des personnes séropositives et malades du sida.

Associations reconnues pour leurs actions de promotion de la santé auprès d’un public nécessitant une approche spécifique.

Centre de référence de l’ULB

Sireas (www.sireas.be)

Prévention à l’attention des publics étrangers et réfugiés. 22, rue de la Croix, 1050 Bruxelles, 02-649.99.58

Hôpital Saint-Pierre, 322, rue Haute, 1000 Bruxelles, 02-535.31.77 Lundi > Vendredi : 9h00 à 12h00 & 13h30 à 17h00 (urgence en dehors de ces heures)

Centre de référence de l’UCL

Modus Vivendi (www.modusvivendi-be.org)

Hôpital Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, 02-764.21.57 Lundi : 15h30 à 17h30 et Mercredi : 11h00 à 13h00

Espace P (www.espacep.be)

Polyclinique Brull, 45, quai Godfroid Kurth, 4020 Liège, 04-270.31.90 Lundi > Vendredi : 9h00 à 17h00 sur RDV

Prévention à l’attention des usagers de drogues. 67, avenue Emile de Béco, 1050 Bruxelles, 02-644.22.00

Prévention à l’attention des prostitué(e)s et de leurs clients. 116, rue des Plantes, 1030 Bruxelles, 02-219.98.74 Antennes : Charleroi : 071-30.98.10 / Namur : 081-72.16.29 / Liège : 04/221.05.09

Ex æquo (www.exaequo.be) Prévention à l’attention des hommes qui ont des relations sexuelles avec d’autres hommes. 41, rue Locquenghien, 1000 Bruxelles, 02-736.28.61 Service Education pour la Santé

Prévention sida, hépatites, IST en milieu carcéral et en milieu précarisé. 139, chaussée de Waremme, 4500 Huy, 085-21.25.76 Courriel : [email protected]

2) Autres associations de prévention sida. Plate-Forme Prévention Sida (www.preventionsida.org) Prévention à l’attention du public général et des personnes séropositives. 67, avenue Emile de Béco, 1050 Bruxelles, 02-733.72.99 Aide Info Sida (www.aideinfosida.be)

Prévention à l’attention du public général et soutien aux personnes séropositives. 45, rue Duquesnoy, 1000 Bruxelles, 02- 514.29.65 Ligne d’écoute tous les jours de la semaine de 18 à 21 heures : 0800-20.120

Sida-IST Charleroi-Mons (www.sida-charleroimons.be) Prévention à l’attention du public général et soutien aux personnes séropositives. 1, boulevard Zoé Drion, 6000 Charleroi, 071-92.54.11 Accueil, écoute, information, dépistage et suivi psycho médico-social des patients HIV. Coordination provinciale Sida Assuétudes Namur

E-mail : ([email protected]) Prévention à l’attention du public général et soutien aux personnes séropositives. 4, rue Docteur Haïbe, 5002 Saint Servais, 081-72.16.21 Dépistage sida et développement d’action de prévention du sida et des MST.

Sid’Action – Pays de Liège (www.sidactionliege.be/presentation.htm) Prévention à l’attention du public général et soutien aux personnes séropositives. 19, boulevard de la Constitution, 4020 Liège, 04-349.51.42

38

VIH ET DROITS

Centre de référence de l’Ulg

CHU-Charleroi / Centre Arthur Rimbaud

92, boulevard Paul Janson, 6000 Charleroi, 071-92.23.05

Hôpital Erasme

808, route de Lennik, 1070 Bruxelles, 02-555.45.36

4) Centres Locaux de Promotion de la Santé et autres organismes. Centre local de promotion de la santé de Bruxelles (www.clps-bxl.org) 67, avenue Emile de Béco, 1050 Bruxelles, 02-639.66.88 Centre local de promotion de la santé du Brabant wallon (www.clps-bw.be) 56, avenue Wisterzee, 1490 Court-St-Etienne, 010-62.17.62

Centre local de promotion de la santé de Charleroi-Thuin

(www.clpsct.org) 1b, avenue Général Michel, 6000 Charleroi, 071-33.02.29

Centre local de promotion de la santé du Hainaut occidental (www.clpsho.be) 9, rue des Cordes, 7500 Tournai, 069-22.15.71

Centre local de promotion de la santé de Huy (www.clps-hw.be) 139, chaussée de Waremme, 4500 Huy, 085-25.34.74

Centre local de promotion de la santé de Waremme

(www.clps-hw.be) 16, Place du Roi Albert, 4300 Waremme, 019-54.65.69

Centre local de promotion de la santé de Liège (www.clps.be) 19, boulevard de la Constitution, 4020 Liège, 04-349.51.44 Centre local de promotion de la santé de Mons Soignies (www.clps-mons-soignies.be) 30, rue de la Loi, 7100 La Louvière, 064-84.25.25

Centre local de promotion de la santé de Verviers (CVPS) (www.cvps-verviers.net) 9, rue de la Station, 4800 Verviers, 087-35.15.03

Centre local de promotion de la santé du Luxembourg (www.clps-lux.be) 49, rue de la Station, 6900 Marloie, 084-31.05.04

5) Pour avoir l’adresse d’un centre de planning familial. Le site d’informations créé par les quatre fédérations de planning familial à l’attention des jeunes (www.loveattitude.be)

H notes

VIH ET DROITS

39

Vivre avec le VIH, ce sont DEUX brochures ! Vous tenez en main notre recueil d’informations et de témoignages sur les aspects juridiques de la vie avec le VIH. Il existe une autre brochure, abordant les aspects pratiques et médicaux, liée au quotidien des hommes et des femmes qui portent le virus. Pour l’obtenir gratuitement, il vous suffit de nous appeler ou de nous envoyer un e-mail. Plate-Forme Prévention Sida 02 733 72 99 ou [email protected] Nos deux brochures sont également consultables sur notre site www.preventionsida.org

2007-Brochure-FVD-2007-DEF.pdf

Editorial Connaître & faire H valoir ses droits. Page 3 of 40. 2007-Brochure-FVD-2007-DEF.pdf. 2007-Brochure-FVD-2007-DEF.pdf. Open. Extract. Open with.

1MB Sizes 17 Downloads 515 Views

Recommend Documents

No documents